La question « Sommes-nous maîtres de nos paroles » semble paradoxale, mais interrogeons-nous tout d'abord sur la notion de « maîtrise » : elle est associée à une idée de contrôle total, une autorité parfaite exercée. Dans notre cas, une « maîtrise de nos paroles » est, semble-t-il, quelque peu ambiguë. En effet, toute maîtrise de la parole sous-entend une action de la conscience sur les mots. Pour simplifier, il faudrait, pour maîtriser nos paroles, que notre conscience agisse seule, choisisse les mots justes et les emploie dans une phrase qui serait comprise dans son ensemble par l'interlocuteur. Or, croire à une telle théorie relèverait de l'utopie. L'inconscient joue un rôle très important dans le langage, en effet, nous cherchons parfois nos mots, mais dans certains cas, les mots « viennent d'eux-mêmes », sélectionnés par notre inconscient et pouvant agir sur notre interlocuteur de telle sorte qu'il ne perçoive plus le sens initial de notre phrase.
[...] Et de ce besoin de communication, l'Homme doit se plier à des règles, des bases, des normes afin de tendre vers une universalité de nos paroles. La dimension sociale nous pousse, elle aussi, à croire que nous devons bel et bien maîtriser nos paroles afin de ne pas blesser ou décevoir certains proches. Nous sommes obligés de cacher nos véritables pensées ou de garder le silence. Cependant, la notion de Vérité et la morale nous poussent, quant à elles, à ne pas mentir à des personnes chères. L'ambiguïté est donc à son apogée et notre conscience prise entre deux feux. [...]
[...] Mais l'environnement naturel peut tout aussi bien nous faire perdre la maîtrise de nos paroles : le bruit, la distance ou un fort écho peuvent altérer la perception de mon message par notre interlocuteur. Nous avons vu dans quelles mesures nos paroles étaient maîtrisables ou non, penchons-nous désormais sur la nécessité de se maîtriser lorsque cela est possible. Sachons en premier lieu qu'une autorité totale exercée sur nos paroles signifierait une appropriation du langage, ainsi mes paroles ne dépendrait que de moi et n'aurait aucun sens pour mon interlocuteur. [...]
[...] Voyons ensemble le cas classique d'une conversation entre deux personnes A et B parlant la même langue, si A pose une question, B peut tout a fait ne pas y répondre : en effet, le silence est une forme de maîtrise de ses paroles. Mais admettons qu'il réponde tout de même, rien n'empêche à B de dire la Vérité ou un mensonge : B a le choix. Et c'est précisément en ce point que nous exerçons une force sur nos paroles. Nous sélectionnons tout d'abord nos mots, et nous choisissons aussi de dire ou de cacher telle ou telle information. [...]
[...] Nous sommes, lorsque nous communiquons, conscients et maîtres de ce que nous voulons dire, du message que l'on souhaite transmettre. Et c'est cette même conscience qui nous fait choisir le mot juste pour imager au mieux notre pensée. Ainsi il existe un nombre important de codes et de symboles permettant aux individus d'échanger des informations selon une base commune : la langue. L'usage de la parole demeure le seul et unique moyen que je possède pour faire avancer des situations, partager des points de vues, des idées. [...]
[...] Fort heureusement, chacun est capable de dompter le langage en apprenant par cœur où en lisant un texte écrit préalablement, afin d'éviter les dérapages que nous citerons ci-dessous. L'utopie d'une maîtrise complète de nos paroles laissera sans aucun doute nombre d'entre nous sceptiques. Le motif principal est sûrement le fait que toute parole soit destinée à quelqu'un, donc nous obéissons à des règles connues de notre interlocuteur (la langue, certains signes ) afin d'être à égal niveau pour converser. Nous ne contrôlons pas ces règles du langage, nous nous y soumettons. [...]
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