Les discours simplistes sur la rivalité dans la course au pouvoir économique et politique entre les grandes entreprises et les États n'ont pas de sens ni de fondements. Il est clairement établi que ces sociétés détiennent un pouvoir économique et politique devenu considérable mais, pour autant, les stratégies qu'elles mènent ne sont pas toujours sans liens avec celles définies par les États eux-mêmes pour préserver ou renforcer leur influence politique.
Les multinationales semblent être confrontées, depuis plusieurs mois, à une forme de crise, fondée sur une contestation croissante de leurs pratiques et de leurs pouvoirs et sur des échecs économiques, voire des désastres sans précédents (...)
[...] L'AMI a été conçu à un moment où l'industrie américaine était considérée comme en perte de vitesse, concurrencée, souvent de façon déloyale, par celle des pays émergents, de l'Europe ou du Japon. L'AMI devait donc préserver la compétitivité américaine en devenant un instrument de défense et de conquête. De plus, au début des années 1990, les présidents américains décidèrent de donner la priorité au combat économique, y compris en réorientant les missions des agences fédérales dans cette voie. L'AMI n'était donc pas la simple expression d'une supposée volonté des multinationales d'imposer leurs vues et de diminuer la puissance de certains États. [...]
[...] L'absence de contrôle dont elles font parfois l'objet a conduit à des faillites qui ne ruinent pas simplement des actionnaires, mais ont parfois des conséquences sociales et politiques : les salariés d'Enron n'auront pas de retraite ; des entreprises, parties de grands groupes, sont vendues à des intérêts étrangers suite à des faillites ou des quasi-faillites, parfois avec l'agrément des États. Ces situations montrent que les multinationales, même lorsqu'elles se délitent, exercent une puissance considérable. Mais l'accélération des scandales ou des graves difficultés de sociétés multinationales, aux États-Unis, en Europe, remettent en cause l'absence de contrôle dont elles font l'objet de la part des États ou des citoyens. [...]
[...] Les entreprises les plus influentes, les multinationales, cherchent donc à modifier les règles et à supprimer les entraves qu'elles rencontrent. Peut-on cependant considérer que ces comportements se résument à la lutte de l'entreprise contre l'État ? Là encore, la réponse ne peut être simpliste. La réalité amène à montrer qu'il s'agit en fait en général, et encore une fois, d'une coalition d'intérêts entre un ou des États et de grandes entreprises dans un combat pour la puissance économique et politique. [...]
[...] Pour autant, il est erroné de penser que ces sociétés utilisent systématiquement leur pouvoir pour échapper aux lois, comploter contre les États. Ces situations ne sont cependant pas rares, mais elles doivent être relativisées et mises en perspective. L'omnipotence de certaines de ces sociétés, notamment américaines, les a conduites parfois à exercer, ponctuellement ou durablement, une partie des prérogatives de certains États ou à renverser des gouvernements. Les exemples sont nombreux : American Fruit , ITT, Elf. L'Amérique latine et l'Afrique ont été ou sont encore le théâtre de ces situations. [...]
[...] Mais ces firmes créent parfois également des centres de style, de design, de recherche localement, avec une forte proportion de salariés recrutés sur place pour mieux répondre aux goûts des consommateurs. Les entreprises créent alors leurs propres espaces au sein desquels circulent leurs matières premières, leurs biens, leurs capitaux, une partie de leurs salariés. Les frontières des États ne sont plus des contraintes. Les administrations enregistrent alors des importations et des exportations à l'intérieur d'un espace homogène, celui de la firme en cause La dernière explication à l'internationalisation des entreprises tient aux très nombreuses acquisitions et fusions enregistrées depuis une dizaine d'années. [...]
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