Au sens le plus commun, un "projet" renvoie à ce que l'on a l'intention de faire, c'est-à-dire étymologiquement à quelque chose qui vient avant que le reste ne soit fait. Cela implique donc une temporalité et une singularité : un projet trouve sa fin à une certaine date déterminée et il en ressort un objet propre aux caractéristiques de ce projet. Un projet n'existe que par un individu et sa conscience, ainsi, il s'agit pour l'homme de répondre à la situation où il se trouve en lui donnant un sens, par conséquent, il doit se projeter.
Descartes se fixe donc comme objectif, comme "projet", une nouvelle maîtrise de l'homme sur la nature. Le mot "maître" a un sens très fort, presque violent, qui instaure l'idée d'une autorité exercée sur quelque chose, d'une gouvernance et d'un commandement. Mais pris dans un sens moins radical, cela peut aussi signifier devenir très habile dans un certain domaine.
Le maître est celui qui a la maîtrise, cela instaure donc l'idée de la perfection, de l'assurance et de la sûreté dans une certaine technique. Cela signifie donc qu'il y a un objet à dominer, des forces difficilement contrôlables qu'il faut contenir. Des obstacles qu'il doit dépasser se présentent donc à l'individu.
[...] Enfin, on peut penser cette possession comme une volonté de gouverner, de régir. Cela rejoint l'idée de l'homme en tant qu'auteur de la nature. Ainsi, son désir est de pouvoir donner des lois à la nature et donc, par la maîtrise des ses causes, pouvoir en anticiper les conséquences. Dans ces différents degrés de maîtrise, on retrouve à chaque fois l'idée que l'homme doit, d'une manière ou d'une autre, pouvoir changer les fins de la nature en fins humaines. Le but est donc à partir d'un problème que la nature pose vis-à- vis de sa condition, de pouvoir annuler ses effets, afin d'acquérir une totale liberté. [...]
[...] Au fond, seul lui peut être entièrement maître et possesseur de la nature puisqu'il en est le créateur. Les hommes, eux, peuvent seulement "faire mine de La nature renvoie ici à l'ensemble des choses considérées comme obéissants à des lois générales, en dehors de l'intervention humaine. La nature s'oppose donc aux notions de liberté, de hasard et d'esprit. Cette nature comme un tout s'explique par la Nature, c'est-à-dire par un principe d'organisation qui n'est pas l'homme, il s'agit donc d'une notion métaphysique. [...]
[...] Il ne s'agit donc pas de s'attarder sur le côté historique de ce projet, mais de chercher à redonner tout son sens à une formule indéfiniment citée. Ce problème va permettre de redéfinir le lien entre la nature et les hommes. Par conséquent, dès lors qu'il y a relation, il y a responsabilité : si nous utilisons la nature à des buts personnels précis, il y a nécessairement une modification du milieu extérieur. De plus, cela replace l'idée que si nous ne pouvons pas nous couper de la nature totalement, tout du moins pouvons-nous tenter de la saisir grâce à la connaissance des lois. [...]
[...] Pour conclure, rappelons le sujet auquel nous avons tenté de répondre : que signifie le projet pour les hommes "de se rendre comme maîtres et possesseurs de la nature Le problème qui s'était alors imposé à nous résidait essentiellement dans une difficulté à définir d'une part le statut de l'homme face à la nature et de l'autre à attribuer une légitimité à ce projet universel. Nous avons tout d'abord vu que cette maîtrise de la nature ne pouvait se faire sans une connaissance des lois qui régissent la nature (c'est-à-dire les sciences physiques) et par l'intermédiaire de techniques résultant de ces découvertes. [...]
[...] Nous pouvons constater que les notions de "maîtres " et de "possesseurs " impliquent toutes deux une qualité, celle de la perfection. Par conséquent, il y a l'idée de la totalité donc de la plénitude. Il n'est donc apparemment pas ici question de posséder à moitié ou encore d'être maître à une certaine échelle. Mais ces deux notions vont être atténuées par la conjonction "comme Cela signifie "tel que "à l'image de Ainsi, avec ce "comme les deux termes précédents perdent une partie de leur sens : il ne s'agit pas d'être maîtres et possesseurs de la nature, mais de faire comme si nous l'étions. [...]
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