Dans ce texte, Rousseau aborde le thème du lien qui unit le mal moral ou la violence et le désir. Il s'agit, en effet, de se poser la question suivante : comment expliquer la violence et le mal qui caractérisent l'homme civilisé ?
La réponse que Rousseau apporte est très claire. C'est l'illimitation du désir liée à l'apparition de la société qui explique la servitude et la volonté de domination. En effet, le début du texte affirme que l'homme sauvage vit en paix avec ses semblables parce que son existence est soumise à la seule loi du besoin. S'il y a violence, elle ne dégénère jamais en guerre parce que seuls les corps sont en conflit (...)
[...] L'illimitation du désir est propre à l'existence sociale. La comparaison conduit à vouloir et désirer toujours plus pour dominer toujours plus. Mais ce désir est toujours en fin de compte désir de supériorité sur l'autre, désir de sortir vainqueur de cette évaluation de mon être par rapport à l'autre. C'est la logique même du désir et de la société selon Rousseau. Tout désir est illimité en raison de la comparaison, et tout désir est désir de domination ou de pouvoir (sortir vainqueur de cette comparaison). [...]
[...] Il nous faut expliquer en quel sens l'homme sauvage est limité au simple besoin. Là encore, c'est l'absence d'une capacité de représentation qui permet de le comprendre. Le besoin concerne le corps, tandis que le désir suppose la représentation de l'objet. Sans cette capacité, point de désir. Ainsi, l'homme sauvage est innocent et en paix. Il est innocent en ce sens qu'étant soumis à la loi du besoin, à la loi du corps, il ne se représente pas le mal c'est-à-dire la domination et l'exploitation de l'autre homme. [...]
[...] Il établit clairement que la vie sociale, en favorisant l'illimitation du désir, est à l'origine de l'inégalité parmi les hommes. C'est la possibilité de la comparaison entre les hommes en société qui explique l'illimitation du désir et la tentation de se placer en position de supériorité en asservissant l'autre. La portée de son argumentation est considérable puisqu'elle nous permet de comprendre la menace qui guette nos sociétés contemporaines qui reposent sur cette illimitation du désir et sur la consommation toujours renouvelée de biens qui ne valent pas en eux-mêmes mais pour ce qu'ils représentent socialement. [...]
[...] Il s'agit tout simplement de trouver des solutions politiques à ce devenir possible du désir. La loi limite ma possibilité de librement accomplir mes désirs à la liberté de tout autre. En ce sens, la loi, si elle est rationnelle et juste, permet d'éviter cette domination dont parlait Rousseau. Rousseau n'est d'ailleurs pas étranger à cette solution politique à la servitude humaine dont le germe est à chercher dans le désir. En effet, le Contrat social apportera une telle solution politique permettant de fonder une société ou tous sont libres et égaux. [...]
[...] En effet, le tableau que Rousseau dresse de l'homme social est tout autre. Degré par degré, l'homme civilisé pourvoit au nécessaire, et puis au superflu : ensuite viennent les délices, et puis les immenses richesses, et puis des sujets, et puis des esclaves Cette phrase montre très clairement la progression du désir de l'homme civilisé. Le besoin nécessaire et limité se transforme en désir superflu ce désir se transforme en désir de luxe les délices et de richesses, et enfin le désir conduit à la domination jusque dans sa forme la plus accomplie esclavage Comment comprendre ce devenir du désir ? [...]
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