Rousseau, les passions, Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes
Rousseau reste fidèle à l'optique traditionnelle de la philosophie, plus soucieuse de juger les passions que de les comprendre : il fait porter sa réflexion sur la valeur morale qu'on doit leur reconnaître. Or, étonnamment, il ne les juge pas a priori bonnes ou mauvaises. Sa volonté déclarée est de rectifier une "erreur", résultant d'un préjugé relatif aux bonnes moeurs, en vertu desquelles il conviendrait de se garder de certaines passions jugées répréhensibles (...)
[...] Rousseau rejoint ainsi Descartes dans son jugement sur les passions. Dans le Traité des passions Descartes dit que "les passions sont toutes bonnes de leur nature, et nous n'avons rien à éviter que les mauvaises usages et leur excès". Après avoir énoncé sa thèse, Rousseau la justifie en recourant à une anaphore qui lui permet de mettre en valeur les trois mots qui désignent les autorités morales à qui il revient de nous dicter notre conduite: la nature, la raison et conscience. [...]
[...] Sa loi est celle de la force, physique. Désirer au-delà de nos forces nous est interdit de fait Voici donc bien démontré par Rousseau, qui tient la nature pour notre premier guide (le seul à nous tenir sous sa loi à l'état appelé précisément "de nature"), qu'il nous est interdit de perdre notre maîtrise affective. Et d'un La raison - à qui il revient de nous guider lorsque nous sortons de l'état de nature, et en qui toute la philosophie classique donne à voir l'autorité morale suprême - limite la satisfaction de nos désirs au seul possible, nous enjoignant de ne désirer que ce que nous avons la capacité et le droit de nous procurer. [...]
[...] Comment penser dès lors que certaines passions puissent être naturellement mauvaises ? Si nos passions nous entraînent au mal, n'est-ce de notre faute, parce que nous nous sommes laissé entraîner, sans leur résister. Il s'agit de "ne pas nous laisser vaincre aux tentations". Rousseau argumente en deux temps: ils énonce tout d'abord sa thèse, qu'il justifie, développe et illustre ensuite. Dans les deux premières phrases, il énonce son point de vue selon lequel les passions tirent leur valeur de la maîtrise que nous exerçons sur elle, en l'opposant à la conception communément admise selon laquelle il y aurait des passions qui seraient bonnes et d'autres non. [...]
[...] Mais a-t-il toujours su gérer ses élans du cœur quand il le fallait ? On voudrait de Rousseau qu'il nous explique comment gérer nos passions pour en garder le dessus, ce qu'il ne fait pas dans le texte à étudier. Cette dernière remarque nous conduit directement à la mise en évidence de ce qui constitue sans doute le principal apport philosophique du texte. Rousseau pense la valeur de la passion en fonction de la liberté intérieure que l'homme est capable d'y préserver. [...]
[...] Ce faisant, Rousseau adopte une position qui prend le contre-pied de celle de ses contemporains qui, tel Kant, pensent que "la passion est une maladie." Posant la question de la valeur des passions dans toute sa radicalité, Rousseau se demande d'où elle leur vient. Il s'avise alors que celle-ci pourrait fort bien ne pas tenir à leur nature, ni même sans doute à leur objet. Il s'agit donc pour Rousseau d'identifier le véritable responsable de leur valeur. Or, selon Rousseau, sur le plan moral seule notre façon de nous comporter est décisive. [...]
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