Si dans certaines de nos sociétés quelques hommes ont le pouvoir de commander à d'autres et qu'ils en obtiennent l'obéissance, c'est grâce à ce "droit du plus fort" que Rousseau discute dans le chapitre 3 du livre I de son Contrat Social, alors qu'il est à la recherche d'un idéal politique où l'homme serait souverain et pilier de l'Etat. Ce qui fonde le droit de certains à imposer aux autres, c'est leur supériorité physique. Ainsi, l'ordre social de nos sociétés n'est parfois rien de plus que la traduction en terme de droit d'un état de supériorité strictement physique au départ. Rousseau en vient donc à s'interroger sur la légitimité de cette transformation. Peut-on fonder le droit sur la force ? (...)
[...] Il dénonce alors catégoriquement l'usage de la force dans les sociétés humaines, bien qu'elle soit encore présente dans certains pays du monde contemporain. Le prétendu droit du plus fort n'est donc en aucun cas légitime pour établir la fondation d'une autorité politique reconnue. Mais est-ce alors à dire que l'usage de la force est toujours condamnable ? Ne faut-il pas établir une nuance sous certaines conditions, notamment les régimes totalitaires ? En effet, bien qu'étant basés sur un droit du plus fort illégitime moralement, ces sociétés n'avaient elles pas pour seul but la prospérité et le bonheur de leur peuple ? [...]
[...] En affirmant ce droit du plus fort l'impunité va devenir un principe moral. Ainsi, Rousseau montre bien qu'il est impossible que la force fasse droit, puisqu'une fois qu'elle disparaît, elle n'impose plus la contrainte à ceux qu'elle dirige et dès lors on est plus obligé d'obéir. C'est pour cela qu'il ne résulte du droit du plus fort qu'un "galimatias" dénué de tout sens. De plus, un régime toujours basé sur la force serait un régime précaire et fragile. En effet, selon l'auteur sitôt qu'on peut désobéir impunément on le peut légitimement Il démontre ainsi que la force ne se limite pas aux lois et à ce qui est autorisé. [...]
[...] Rousseau approfondira plus loin dans le texte. Ainsi, que faut il de plus au plus fort pour qu'il soit toujours le maître ? Rousseau répond dès la première phrase à cette interrogation, en expliquant que la force est en elle seule sans valeur, et qu'elle doit recevoir sa légitimité de l'extérieur. Pour obtenir sa légitimité, la force doit être conforme au droit, c'est-à-dire aux exigences morales. Or la force ne peut acquérir une valeur morale qu'en se soumettant au droit. [...]
[...] De cette façon, il y a toujours un individu plus fort que les autres et ce n'est jamais le même, car les capacités physiques des êtres vivants évoluent avec le temps. La force ne peut donc selon lui créer aucun pouvoir durable. Rousseau réalise bien la distinction entre fort et maître : le plus fort veut être le maître. Ainsi, un rapport physique désire devenir un rapport politique. On voit que c'est possible à l'échelle du fait, puisque les sociétés l'appliquent depuis toujours, mais est ce le cas au niveau du droit ? [...]
[...] Dès ce moment, ceux qui l'acceptent la respectent comme un devoir. Le plus fort aurait alors un pouvoir d'autant plus solide qu'il a réussi à transformer sa force en droit car il a ajouté à sa force physique une valeur morale qui l'assure du soutient du peuple. Cependant s'il ne réalise pas cette transformation, il ne sera pas respecté, et l'obéissance ne se fera que par contrainte, en attendant une possible révolte. Rousseau insiste pour dire que cette notion du droit du plus fort est ironique, puisque la force ne confère aucun droit, bien qu'il ait été constaté que ce droit soit réellement établi quand le fort impose véritablement sa volonté. [...]
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