Rôle politique des artistes, évolution sociétale, Alfred de Musset, Lamartine, Charte 77, Res publica
« Un peuple malheureux fait les grands artistes » écrivait Alfred de Musset dans Lorenzaccio, ce drame romantique où le héros, le jeune Lorenzino de Médicis, affronte la tragédie du politique. Et cette pensée de Musset n'est pas sans rappeler quelques grands noms de l'Art, d'un Verdi triomphant en 1842 avec son Nabucco dans une cité milanaise sous domination autrichienne à l'artiste dissident chinois Ai Wei Wei en liberté provisoire depuis le 22 juin dernier. Car notre histoire récente regorge d'hommes et de femmes, artistes certes mais dont les opinions politiques prirent très souvent l'ascendant sur leur œuvre : c'est Lamartine qui, membre du gouvernement provisoire de 1848, signa le décret d'abolition de l'esclavage le 27 avril 1848, c'est l'engagement communiste de Frida Kahlo et Diégo Riviera, c'est la mort, en déportation de Robert Desnos et de Max Jacob, c'est enfin la musique dissidente de The Plastic People of the Universe à l'origine de la Charte 77. Car, au travers de leurs créations, ces artistes affirmèrent non seulement leur engagement mais surtout l'intrusion de l'Art sur la scène politique, notamment par le rôle public que possède l'artiste dans la société et de laquelle il s'inspire. Ainsi influencée, sa création l'est aussi par les évènements de la Res publica : chaque homme étant, pour reprendre la célèbre formule d'Aristote, un animal politique, l'artiste, en tant qu'homme, n'y échappe pas.
[...] Le rôle politique des artistes « Un peuple malheureux fait les grands artistes » écrivait Alfred de Musset dans Lorenzaccio, ce drame romantique où le héros, le jeune Lorenzino de Médicis, affronte la tragédie du politique. Et cette pensée de Musset n'est pas sans rappeler quelques grands noms de l'Art, d'un Verdi triomphant en 1842 avec son Nabucco dans une cité milanaise sous domination autrichienne à l'artiste dissident chinois Ai Wei Wei en liberté provisoire depuis le 22 juin dernier. [...]
[...] Cependant, cette évolution n'implique pas nécessairement l'absence de convictions politiques des artistes et bien qu'ils demeurent minoritaires ceux qui s'affichent clairement et s'engagent, on peut cependant citer le travail de Banksy, graphiste britannique auteur de nombreux graffitis le long de la barrière de séparation israélienne et appelant à la paix entre Israël et la Palestine. De même, il est l'auteur d'un documentaire appelant à la désobéissance civile, « The Antics Roadshow ». Ainsi, les artistes semblent posséder un rôle politique car ils créent et représentent en s'inspirant de la société où prédomine toujours le politique, mais ils se sont forger, en participant aux grands évènements historiques, un rôle politique prépondérant et qui, sous certains aspects, influença particulièrement leurs œuvres. [...]
[...] En Chine, le plasticien Ai Wei Wei, en liberté provisoire depuis le 22 juin dernier, fait parti des 303 signataires de la Charte 08. En Iran, le cinéaste Jafar Panahi est emprisonné depuis décembre 2010, condamné à six ans de prison et à l'interdiction de faire des films en Iran pour avoir osé critiquer le régime d'Ahmadinejad lors de la révolution verte de juin 2010 tandis que le film Au Revoir de Mohammad Rasoulof décrit la situation désespérée de l'Iran d'aujourd'hui. [...]
[...] Cependant, leur rôle a évolué comme évoluent les sociétés et la chute des idéologies autant que l'avènement de la démocratie et de la mondialisation de l'art semblent avoir restreint leur capacité d'engagement qui, s'il existe encore aujourd'hui, relève davantage de l'effet de mode, de l'altruisme valorisant et du consensus que de la réelle prise de risque. Seuls, dans les pays où la démocratie est mise à mal, subsistent des artistes réellement engagés, comme les grands noms de nos cultures, peut-être parce que, comme l'écrivait Guy de Maupassant dans Pierre et Jean : « Les grands artistes sont ceux qui imposent à l'humanité leur illusion particulière ». [...]
[...] Par là-même, l'auteur exprime sa méfiance non seulement envers les idéologies naissantes mais également envers la participation des artistes à la politique. Détournées des idéologies, assagies par la liberté, nos sociétés n'offrent guère plus de possibilité à l'artiste de s'enthousiasmer ou de se révolter et de symboliser son engagement ; cette perte d'enjeu participant à un désintérêt plus général envers la politique. Devenue par certains aspects trop caricaturale, cette dernière est devenue davantage un sujet de moquerie pour les artistes qu'un réel objet d'inspiration ; et même aujourd'hui l'humour caustique et grinçant d'un Desproges ou d'un Coluche semble avoir disparu. [...]
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