« Le rire est, avant tout, une correction. Fait pour humilier, il doit donner à la personne qui en est
l'objet une impression pénible. La société se venge par lui des libertés qu'on a prises avec elle. Il
n'atteindrait pas son but s'il portait la marque de la sympathie et de la bonté. » (Henri Bergson, 11900;
éd. PUF, 1940, p.150)
Vous commenterez et discuterez cette définition du rire en vous appuyant sur des exemples littéraires
précis et variés.
Le rire, phénomène physique proprement humain, éveille la curiosité. Depuis l'Antiquité, il a
fait l'objet de multiples réflexions et recherches aussi bien en biologie - étude du phénomène physique-
, en philosophie -étude de ses ressorts intellectuels-, qu'en sociologie -étude de sa fonction sociale. En
1900; dans Le Rire, Bergson entend faire une synthèse de toutes les idées déjà développées sur le sujet
en donnant une définition exhaustive de ce qu'est le rire. Pour lui, c'est la disproportion entre un idéal
partagé de fluidité des mouvements et des idées et une réalité dans laquelle cette fluidité n'est jamais
fluidité n'est jamais vérifiée qui éveille le rire, « mécanique plaquée sur du vivant ». Dans un passage
de son ouvrage, en particulier, Bergson insiste sur la nature profondément sociale du rire qui serait,
« avant tout, une correction » par l'usage de laquelle « la société se venge… des libertés qu'on a prises
avec elle.' Cette définition d'un rire qui serait « fait pour humilier » est énoncée sans que soit établie
une distinction particulière pour le rire en littérature - celui que la littérature éveille chez le lecteur, et
dont elle se fait le reflet. Si comme le suggère ici Bergson le rire n'est mis en branle qu'en écho à un
but social prémédité, qu'il ne se motive et ne s'entretient que par sa fonction de régulation sociale,
alors le rire littéraire ne doit admettre aucune spécificité. Subordonné à l'existence d'un système social
donné, il n'apparaît ainsi que comme élément annexe d'une littérature aspirant à l'universalité. Aussi,
la question que soulève le propos de Bergson est la suivante: peut- il y avoir une autonomie du rire en
littérature? Dans une première perspective, le rire, même porté par la littérature, semble profondément
social: il garantit une certaine inertie de la société. Pourtant, il peut également se révéler en rupture
avec cette société, et ne s'exercer que dans la sphère littéraire. Finalement, le ire peut être envisagé
comme puissance régénératrice s'affirmant au travers de l'écriture et de la création.
[...] Si comme le suggère ici Bergson le rire n'est mis en branle qu'en écho à un but social prémédité, qu'il ne se motive et ne s'entretient que par sa fonction de régulation sociale, alors le rire littéraire ne doit admettre aucune spécificité. Subordonné à l'existence d'un système social donné, il n'apparaît ainsi que comme élément annexe d'une littérature aspirant à l'universalité. Aussi, la question que soulève le propos de Bergson est la suivante: peut- il y avoir une autonomie du rire en littérature? Dans une première perspective, le rire, même porté par la littérature, semble profondément social: il garantit une certaine inertie de la société. [...]
[...] Le revirement de situation, alors que le père Ubu change finalement d'avis, n'est pas plus motivé et justifié La scène se clôt donc sur un départ, celui du père Ubu, alors que sa femme rassure le spectateur, semblant dire: ne vous inquiétez pas, il se passera quelque chose Ce qui fait rire ici, outre le comique de mot, la vulgarité et l'absurdité du comportement des personnages , c'est la distinction établie par rapport aux scènes d'exposition traditionnelles. Le rire n'est pas la vengeance de la société, il fait au contraire de la société l'objet d'une vengeance individuelle espérant acquérir une portée collective. Mais alors qu'ici encore le rire est offensif, il existe un autre rire, plus ténu peut- être, mais dénué de ce rôle offensif et pouvant faire naître la sympathie. Un tel rire est pour ainsi dire en sourdine, anodin apparemment, voire affectueux, et peut acquérir une dimension spécifiquement littéraire. [...]
[...] Composition francais Composition français Sujet commun: ENS Ulm - Lettres et Sciences Humaines - 2006 Le rire est, avant tout, une correction. Fait pour humilier, il doit donner à la personne qui en est l'objet une impression pénible. La société se venge par lui des libertés qu'on a prises avec elle. Il n'atteindrait pas son but s'il portait la marque de la sympathie et de la bonté. (Henri Bergson, 11900; éd. PUF p.150) Vous commenterez et discuterez cette définition du rire en vous appuyant sur des exemples littéraires précis et variés. Le rire, phénomène physique proprement humain, éveille la curiosité. [...]
[...] Finalement, le ire peut être envisagé comme puissance régénératrice s'affirmant au travers de l'écriture et de la création. A la fois pensé et provoqué par l'écrivain, et orienté par son ambition de corriger la société en jouant de la capacité d'autocensure des spectateurs ou lecteurs, le rire tel qu'il s'exprime dans l'expérience littéraire a un caractère profondément social; il semble jouer le rôle de garant de l'inertie de la société. Le rire est fait c'est-à-dire que l'origine du rire que peut laisser échapper le lecteur d'une histoire comique tient à la volonté de l'auteur lui- même, penseur et artisan du passage comique. [...]
[...] Le rire éveillé par la littérature ne semble dons pas se démarquer d'une définition plus générale donnée par Bergson. En revanche, sa portée très large -à chaque représentation théâtrale une foule de spectateurs convertis, de même que pour chaque livre lu- en fait un outil particulièrement efficace de régulation sociale. Cependant, Bergson souligne la nécessité, pour que le rire puisse exister, se justifier et s'entretenir, d'une nature offensive du rire. En effet, reposant sur le mécanisme d'autocensure des lecteurs ou spectateurs, l'efficacité du rire est subordonné à sa force d'attaque: il répond en réalité à une logique réactive par laquelle il s'agit pou la société de se venger des libertés qu'on a prises avec elle De façon générale, ces libertés évoquées par Bergson peuvent correspondre à toutes les formes d'excès, nuisibles à la stabilité de la société: c'est l'amour de l'argent, la cupidité qui sont visés dans L'Avare. [...]
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