« Représenter » signifie rendre présent, donner image d'une chose ou d'une action qui rend sensible une chose ou une action absente ou impossible à montrer telles quelles. C'est donc à la fois « assurer la présence de » et « remplacer » une chose, la formation par l'esprit d'une image à partir d'une réalité donnée, qu'elle soit donnée dans l'expérience ou non.
Représenter la liberté sous-entend déjà que la liberté est une réalité qui doit faire l'objet d'une médiation afin d'être saisie par l'esprit. La représentation est en ce sens un acte d'abstraction, qui consiste à tirer un concept ou une image du réel, c'est-à-dire quelque chose qui trouve son équivalent dans le réel mais qui ne se donne pas spontanément à l'esprit en tant que perception.
Dans quelle mesure la liberté répond-elle à ce présupposé que suggère l'expression « représenter la liberté » ?
De plus, on voit ici apparaître deux niveaux, comme si la liberté se présente doublement : comme réalité à représenter, immanente, subjective, car relevant d'une expérience particulière du sujet / comme objet représenté, c'est-à-dire comme concept, en tant qu'idée universelle.
La représentation de la liberté serait alors cette médiation par laquelle la liberté passerait d'une expérience subjective à un concept universel, d'une réalité immanente mais en même temps insaisissable à une idée qui puisse être saisie par tous. Représenter la liberté, se serait alors la faire apparaître, elle qui semble se donner comme absente.
C'est donc la question de la réalité, de la nature et des manifestations possibles de la liberté qui se pose ici. Comment celle-ci se présente-t-elle à l'esprit, comment en fait-il la saisie ? Comment justifier la nécessité de représenter la liberté ? Et, au-delà, cette transformation par la représentation, c'est-à-dire la création du concept, ne risque-t-elle pas de dépasser, d'épuiser, voire de mythifier le concept lui-même ?
[...] C'est peut-être par la définition d'une liberté en situation, et non plus en représentation, que doit s'orienter la philosophie, grâce à la distinction entre les deux verbes penser et représenter L'on peut alors, avec MP, dans la Phénoménologie de la perception, poser la liberté non pas comme une chose en soi, un noumène qui devrait s'actualiser, mais comme un objet dynamique, qui n'existe qu'en tant qu'il est en situation, en acte. Poser la liberté comme négativité, comme transcendance, comme élan hors de soi-même a ceci d'intéressant que cela permet de faire échapper la liberté à la nécessité d'une représentation. La liberté n'est pas à proprement parler, elle est tension, c'est un possible, une espérance. Dans cette perspective, quelle place donner à une représentation de la liberté par l'image ? [...]
[...] La modalité de représentation du langage est donc de faire une abstraction. La liberté peut-elle dès lors être représentée par le langage ? III. Vers un au-delà du langage : une liberté en situation, et non plus en représentation La liberté semble en effet se représenter essentiellement par le discours. Pour parler de la liberté, l'on développe une nébuleuse de termes connexes pour rendre compte de la complexité de cette réalité, qui se traduisent d'abord par des termes de l'action : motif, mobile, intention, finalité, projet, décision, choix. [...]
[...] En tant que l'Histoire est faite par les actions des hommes, elle est une manifestation de la liberté, non pas d'une liberté individuelle, mais d'une liberté du groupe. Il n'en reste pas moins que cette phénoménalisation de la liberté reconduit une dichotomie entre une liberté intérieure invisible et une liberté extérieure qui se donne à voir. Représentation qu'il est nécessaire de questionner. II. La liberté peut-elle être représentée, voire universalisée, sans être mise en danger ? Prolongeons la remarque faite sur la liberté représentée à travers et dans le processus historique. [...]
[...] Le langage représente la liberté en terme de cause et d'effet, c'est-à-dire en terme de prévisibilité . L'erreur, c'est de passer de cette représentation à la croyance que cette représentation est la réalité. Il y a dans le langage une certaine modalité qui tend à figer la liberté en termes statiques, car le langage, en tant qu'il représente, porte en lui la volonté d'aller vers le plus simple. Sinon il n'y aurait pas besoin de représentation. Mais peut-on, dès lors, avouer avec Bergson que toute tentative de définition de la liberté, par le langage, en tant qu'il est animé d'une volonté simplificatrice, est impossible ? [...]
[...] De plus, on voit ici apparaître deux niveaux, comme si la liberté se présente doublement : comme réalité à représenter, immanente, subjective, car relevant d'une expérience particulière du sujet / comme objet représenté, c'est-à-dire comme concept, en tant qu'idée universelle. La représentation de la liberté serait alors cette médiation par laquelle la liberté passerait d'une expérience subjective à un concept universel, d'une réalité immanente, mais en même temps insaisissable à une idée qui puisse être saisie par tous. Représenter la liberté, se serait alors la faire apparaître, elle qui semble se donner comme absente. [...]
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