Comment peut-on penser une règle qui se caractérise par sa forme générale sensée s'appliquer à toutes choses avec une exception ? L'exception nie le concept même de règle, elle entame sa caractéristique de nécessité et pourtant la plupart des règles ont leurs exceptions que ce soit en droit, en grammaire ou dans les lois physiques, d'où le fameux proverbe « c'est l'exception qui confirme la règle ». Comment doit-on comprendre cette expression, fait-elle réellement sens ? Une règle est ce qui doit être, elle a pour caractéristique de s'appliquer à toutes choses qui la concernent (c'est cela même la définition d'Aristote), alors pourquoi un fait qui devrait se soumettre à cette règle et qui ne le fait pas n'entame pas la règle ? Pourquoi poussons nous la logique encore plus loin en disant qu'elle la confirme ? Peut-on réellement penser une règle en pensant ses ou son exception(s) ? Le problème est ici notre mode même de raisonner. Ce sont les Hommes qui établissent les règles qu'on parle de grammaire ou de lois physiques. La question est donc de savoir si les exceptions prouvent à l'Homme une faille dans son système d'appréhender le monde (les exceptions sont elles créer par l'Homme au sens où c'est lui par ses règles imparfaites qui excluent certains faits qu'il ne peut expliquer autrement ?) ou si les exceptions ont bel et bien une existence ontologique si elles s'éloignent réellement de la règle.
Ce qui est en jeu ici ce n'est rien de moins que les limites de notre entendement, les limites de notre compréhension du monde.
Notre entendement, comme l'a dit Kant, est limité et nos règles ne sont pas parfaites, notre appréhension du monde comporte toujours une certaine distance à la réalité et cette distance crée les exceptions, nous considérons qu'elles sont ontologiquement existantes mais elles ne sont probablement que le fruit de notre entendement (I), mais que ces exceptions soient ou non réellement existantes peu importe, elles nous éclairent sur les règles, nous permettent de les comprendre voire nous permet de les édicter (II), et en suivant cette logique les exceptions reçoivent une utilité pratique car comme le montre l'évolution historique des sciences, les exceptions nous permettent de développer notre entendement et de surpasser les barrières de notre entendement face à la réalité (III).
[...] Et pourtant elle n'annule pas la règle pour autant, elle ne la met pas en cause. L'exception est à part, en dehors de la règle (de sa racine latine exceptare qui signifie retirer à tout instant). L'exception paraît unique, c'est une particularité, une anomalie. Ce terme se rapporte à l'adjectif exceptionnel, qui est caractère tout d'abord rare mais ce qui donne également un jugement de valeur, ce qui est exceptionnel sort de l'ordinaire, suscite la curiosité, l'étonnement et parfois l'admiration ou le dégoût. [...]
[...] L'exception dévoile donc la règle, et même plus elle l'explique. C'est son caractère particulier voire singulier qui pointe le général. Aristote reprend bien cette idée. Selon lui, dans la Nature, il y a un ordre avec des règles qui régissent la nature en vue d'une fin. Mais le hasard a sa place dans le système aristotélicien, il existe par exemple des monstres qui sont contre-nature, c'est-à-dire qui ne suivent pas les règles, l'ordre habituel de ce qui arrive la plus souvent. [...]
[...] C'est en ce sens qu'il faut comprendre l'exception devient la règle L'exception est détentrice de nouvelles règles, comme l'a dit Canguilhem l'anormal n'est pas hors norme mais en possession de nouvelles normes C'est ainsi qu'on voit qu'au-delà du lien entre exception et règle, il existe un véritable surpassement de cette distinction puisque l'un permet l'autre et ainsi de suite. C'est une boucle. L'Homme édicte une règle, il rencontre une exception qu'il met hors de la règle pour pouvoir continuer à appréhender le monde, finalement il trouve une solution en édictant une nouvelle règle sans l'exception précédente puis il rencontre une nouvelle exception On pourrait qualifier cette caractéristique de pouvoir de l'exception sur la règle. [...]
[...] Si on trouve une exception à une règle c'est simplement qu'on ne connaît pas la cause de cette exception, on ne peut pas l'expliquer alors on l'explique par l'exception, mais ceci révèle en réalité notre ignorance. (CITATION DE CLAUDE BERNARD). L'exception n'est donc que le fruit du caractère imparfait de l'entendement de l'Homme, c'est sa façon d'appréhender les choses qui crée l'exception, c'est un jugement entendu qui exclut un fait d'une règle. On pourrait tout de même se demander si dans la réalité, dans la Vérité, l'exception n'existe elle pas ? Pourquoi ne pas penser un caractère ontologique de l'exception ? [...]
[...] Pourtant elle n'a pas qu'un caractère négatif, l'exception dans notre système a une place très importante, bien qu'elle souligne que nos règles ne sont pas parfaites, elle les explique d'autant mieux et nous permet même de les édicter. C'est en remarquant quelque chose d'exceptionnel qu'on se rend compte qu'il existe un ordre. On ne peut donc pas tout expliquer et on ne comprend pas tout mais grâce au plus difficile (à ce qui nous résiste, ce qu'on ne peut pas expliquer, ce qui nous étonne) on peut expliquer tout le reste. II. L'exception confirme la règle C'est par l'exception qu'on s'aperçoit d'une règle. En effet elle la dévoile. [...]
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