Religion, étymologie, sémantique, Cicéron, Lacante, Saint-Augustin, Saint Thomas d'Aquin
Lorsqu'on cherche à définir un concept, on cherche à en déterminer le sens par une formule précise qui délimite son essence, c'est-à-dire l'ensemble des caractères constitutifs et invariables qui font ce qu'il est. Le procédé généralement utilisé pour définir un concept consiste à se référer (dans un dictionnaire par exemple) à la signification du mot qui désigne ce concept. Or, lorsque la signification est plurielle, vague ou indéterminée, la recherche du sens essentiel se dirige habituellement vers l'étymologie du mot, une approche qui consiste à étudier les origines du mot suivant son évolution à partir de l'état le plus anciennement attesté.
[...] Avec l'apparition de cette synthèse augustinienne, Saint Thomas d'Aquin propose de retracer à sa manière les limites de l'essence de toute religion. La réponse de Thomas d'Aquin à la divergence qui distingue ces trois manières de comprendre l'essence de "religio" consiste à neutraliser leurs différences, en vertu de leur commune référence au même et unique terme final, Dieu : au fond, que ce soit sur le mode de répétition du recueillement des cultes divins (Cicéron), de la liaison qui crée un attachement constant (Lactance), ou du choix de prédilection réalisé dans la conversion (Augustin), ces compréhensions convergent toutes vers un point central constituant l'essence de la religiosité : l'homme est « ordonné à Dieu », c'est-à-dire n'accomplit proprement ce qu'il est que dans la relation à Dieu compris ici comme le Dieu unique et transcendant du monothéisme biblique. [...]
[...] La tentative de définition de l'essence de toute religion doit donc s'établir d'abord sur une approche existentielle du sujet religieux, dans la condition ontologique qui est la sienne, mais ne peut que prétendre qu'à une hypothétique universalité car il ne peut savoir si son expérience de la religiosité coïncide avec celle des autres. Un des principaux travaux de la philosophie des religions consiste à penser, par-delà les oppositions des doctrines et des croyances de chaque religion, la similitude qui rapproche jusqu'à la quasi-identité les attitudes et les modes de pensée religieux, afin d'en dégager l'essence commune et universelle de toute religion. Une des approches envisageables, lorsqu'on cherche à définir l'essence d'une chose ou d'un concept, consiste à faire recours à l'étymologie du mot qui le désigne : "religion". [...]
[...] Au IVème siècle, Saint-Augustin reconnaît, en vertue des interprétations de Cicéron et Lactante, que l'essence du concept latin originel "religio" est un mode de relation sociale, un rapport intersubjectif habité par une conscience d'une proximité morale et affective, qui implique des devoirs. L'apport de St Augustin à l'élaboration du concept de religion consiste à transposer cette relation de proximité intersubjective en l'appliquant au rapport de l'individu à Dieu - conçu désormais à partir de sa révélation par le Christ des Évangiles. [...]
[...] Le recours à l'étymologie permet-il de définir ce qui fait l'essence de toute religion ? Lorsqu'on cherche à définir un concept, on cherche à en déterminer le sens par une formule précise qui délimite son essence, c'est-à-dire l'ensemble des caractères constitutifs et invariables qui font ce qu'il est. Le procédé généralement utilisé pour définir un concept consiste à se référer (dans un dictionnaire par exemple) à la signification du mot qui désigne ce concept. Or lorsque la signification est plurielle, vague ou indéterminée, la recherche du sens essentiel se dirige habituellement vers l'étymologie du mot, une approche qui consiste à étudier les origines du mot suivant son évolution à partir de l'état le plus anciennement attesté. [...]
[...] Cette influence ne peut être négligée si l'on veut définir une essence objective et universelle de toute religion. Cela reflète en réalité une difficulté plus profonde propre à la définition de l'essence de religion qu'il est nécessaire d'éclaircir, afin de savoir si l'étymologie est en mesure de la surpasser : peut-on définir une essence objective et universelle de toute religion sans expérimenter la dimension sacrée, mais entièrement subjective, du phénomène de la religiosité ? La dimension objective de la religion, telle qu'elle peut être étudiée par les sciences humaines, présente l'avantage de dégager la similitude qui rapproche - jusqu'à désigner ces phénomènes du même nom - les religions. [...]
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