On dit souvent qu'au fur et à mesure des avancées de la science, l'homme domine de plus en plus son environnement. La science serait un ensemble de lois à valeur universelle et inter-reliées qui formerait un ensemble de connaissances vérifiables. Mais qu'en est-il de la capacité de la science à décoder le réel, c'est-à-dire à savoir ce que les choses sont ontologiquement ? Ainsi, on peut se demander si les lois scientifiques ont accès au réel ou si elles ne servent qu'à formuler des grilles hypothétiques d'interprétation qui se fondent sur notre système perceptif et non sur les choses telles qu'elles sont en réalité. Quelle est donc la portée de la science ? Les expériences sur lesquelles se fondent les lois scientifiques sont des expériences que le scientifique "fait parler", c'est-à-dire qu'il interprète à partir de ce qu'il sait et de ce qu'il suppose (...)
[...] L'expérience est insuffisante pour fonder la connaissance selon la tradition strictement rationaliste (Platon, Descartes, Spinoza Pour Platon, la vraie réalité est alors à aller chercher dans un monde intelligible, le monde des Idées, au fondement de tout ce qui existe dans le monde sensible et qui en permet la connaissance. La réalité doit nous donner les choses telles qu'elles sont en elles-mêmes et pas seulement telles qu'elles nous apparaissent. Elle est leur vérité et, comme telle, elle s'identifie à un substrat métaphysique, support des qualités sensibles. [...]
[...] Le privilège est donc accordé à la théorie, aux Idées, conçues comme pure activité de raisonnement. Il y aurait donc une distinction à faire dans le réel entre un niveau supérieur, celui du concept, qui s'opposerait à l'infériorité du sensible, pensée comme une copie déficiente du niveau intelligible (voir livres VI et VII de la République, où Platon explicite cette ontologie notamment avec la célèbre allégorie de la Caverne). Il s'agit en fait pour Platon d'un véritable réalisme des Idées qui met en concurrence la perception sensible, c'est-à- dire l'expérience, avec la théorie. [...]
[...] Quelle est donc la portée de la science ? Les expériences sur lesquelles se fondent les lois scientifiques sont des expériences que le scientifique fait parler c'est à dire qu'il interprète à partir de ce qu'il sait et de ce qu'il suppose. Comme nous le montre l'analyse du spectre de la lumière, nos sens peuvent nous induire en erreur et dans cette mesure, l'homme qui croirait détenir des vérités serait en réalité le plus ignorant de tous car il serait dans l'erreur. [...]
[...] Cependant on peut tout de même retenir certains éléments importants dans le cadre de la réalité scientifique. D'une part l'expérience n'est pas la réception passive de données brutes, elle doit être tissée d'un apport théorique pour pouvoir fournir des informations utilisables. D'autre part le scientifique se doit de faire preuve de créativité conceptuelle pour organiser et donner sens à l'expérience. Soulignons de plus que dans tous les cas, nous ne renonçons pas à un principe réaliste, qui doit être celui de toute science et que la volonté de dire le réel se concrétise dans la formalisation au moyen de l'expérience de pensée, c'est-à-dire de l'intellect. [...]
[...] Alors que paradoxalement, ce qui est réel à nos yeux c'est ce que l'on peut mesurer ou dit autrement, ce qui est effectif. Comment pourrait-on relier une infinité de phénomènes aux théories que notre intellect élabore si on ne sélectionne pas les paramètres qui doivent être pris en compte dans le cadre de l'expérience? Voilà pourquoi on doit partir de questions en lien avec notre intuition avant d'observer activement ce qui se présente à nos yeux et non pas empiler passivement des observations sans savoir à quoi elles pourraient servir. [...]
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