Dans le mythe de l'attelage ailé, Platon représente la raison (nous) comme un cochet (âme raisonnante) qui tient les reines d'un cheval blanc (âme qui veut) et d'un cheval noir (âme désirante); or, les caprices des passions sensuelles ont provoqué la chute du cortège dans le monde sensible et l'incarnation ou plutôt l'emprisonnement de l'âme dans un corps. L'âme de l'ignorant, prisonnier de la caverne du monde sensible, est exilée, lestée par des masses de plomb, et a des ailes desséchées par la doxa; au contraire, l'âme du philosophos se sent pousser des ailes lorsqu'elle reconnaît ou plutôt se ressouvient de l'essence et s'envole alors vers sa patrie: le monde intelligible.
[...] Mais, il a aussi une fonction épistémique: étant donné qu'il est impossible de fonder rationnellement les fondements de la connaissance rationnelle, il s'agit de croire en l'existence du monde des Essences et surtout au principe de l'Un-Bien qui transcende ces Essences. Ainsi, la raison n'a pas raison de se défier de la croyance car la croyance est au fondement même de la raison. Enfin, il est irrationnel que la raison se défie de la croyance car la foi est au-delà de la raison. En effet, la faculté de la raison sont limitées: la raison est incapable de tout appréhender. Or, ce qui est inaccessible à la raison ne peut être que cru. [...]
[...] La raison n'a pas raison de se défier de la croyance car il est irrationnel que la raison se défie de la foi rationnelle. Il est irrationnel que la raison se défie de la foi car la raison a besoin de la croyance. La croyance est nécessaire au savoir rationnel car la croyance est le moteur de la recherche de la vérité. Dans la Vie de Galilée de Brecht, Galilée croit ce qu'il voit et combat contre une croyance religieuse aveuglante qui cherche à préserver l'ordre scientifique, anthropologique et politique. [...]
[...] Ainsi, la raison a raison de rejeter la croyance-illusion, d'un point de vue théorique toute croyance irrationnelle et d'un point de vue pratique toute croyance déraisonnable. La raison doit donc se défier de la croyance car toute croyance a par définition un défaut de preuve rationnelle et est susceptible d'être irraisonnée ou de devenir déraisonnable. Pour autant, la raison a-t'elle raison de se défier de toute croyance? Peut-elle raisonnablement douter de toute forme de croyance, même les plus raisonnables? Mais, une croyance peut-elle être raisonnable? Doit-elle rationnellement ne pas accorder sa confiance à toute forme de croyance, même les plus rationnelles? [...]
[...] Mais surtout, il est donc irrationnel que la raison se défie de la croyance puisque la foi est au-delà de la raison: le cœur a ses raisons que la raison ignore. Mais, il est rationnel et raisonnable que la raison se défie de la croyance aux mystères naturels car la raison peut connaître et dévoiler la nature. La raison a donc raison de se défier de la croyance irrationnelle et déraisonnable et de passer au crible de la rationalité la croyance. [...]
[...] Pourtant, même s'il a raison, Galilée rétracte raisonnablement sa croyance rationnelle en l'héliocentrisme. De plus, la croyance est nécessaire à la science: le disciple doit croire en la bonne foi de son maître, l'historien doit croire aux témoignages historiques. Certes, le disciple ou l'historien doivent faire preuve d'esprit critique et faire un examen critique des paroles reçues et des documents. Ainsi, la raison doit se défier de la croyance mais elle ne peut pas systématiquement ne pas accorder du crédit à la croyance. [...]
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