Au départ, il s'agit de prévenir le retour du racisme, en livrant donc un plaidoyer en faveur de l'équivalence des cultures. Le raisonnement demeure valide, et la thèse s'énonce ainsi : le "progrès" n'existe que parce que des cultures différentes entrent en contact, au risque d'une homogénéisation qui appauvrit les chances ultérieures de progrès. "La civilisation mondiale ne saurait être autre chose que la coalition, à l'échelle mondiale, de cultures préservant chacune son originalité" (p. 77) : ne voilà donc pas un apophtegme qui devrait présider à toutes nos réflexions sur la mondialisation ? Surtout à l'orée de cette année 2009 qui devrait voir, concrètement, les remises en cause les plus concrètes de cette mondialisation ? (...)
[...] Et c'est seulement de temps à autres que l'histoire est cumulative (p. 39). Pourtant, après avoir passé de longues pages à démonter la notion de progrès telle qu'elle est usuellement comprise, il arrive à la civilisation occidentale. Mais l'universalité de celle-ci, à quoi tient-elle ? Si ce n'est pas le consentement qui fonde la supériorité occidentale, n'est-ce pas alors cette plus grande énergie dont elle dispose et qui lui a précisément permis de forcer le consentement ? nous atteignons ici le roc. [...]
[...] Esquivant la question de l'inné et de l'acquis, CLS avance : il y a beaucoup plus de cultures humaines que de races humaines (p. 11). On ne saurait donc prétendre avoir résolu par la négative le problème de l'inégalité des races humaines si l'on ne se penche pas aussi sur celui de l'inégalité des cultures humaines (p. 12). Or, il y a une nécessité de la diversité de ces cultures : elle est moins fonction de l'isolement des groupes que des relations qui les unissent (p. [...]
[...] Fort bien : mais rien n'est dit de la possibilité de préserver une originalité, alors que justement on a constaté la domination de la civilisation occidentale (réceptacle de cultures diverses) et montré que cette domination était forcée. C'est toute la question de la mondialisation qui est en fait posée. La mondialisation est-elle unification du monde dans une culture unique, qui aurait des variations locales ? où est-elle instrument de domination, vouée à l'échec puisque le progrès impose la diversité et que cette unification qui entrave la diversité entrave dès lors le progrès ? Question subsidiaire : la mondialisation est-elle forcément occidentalisation ? [...]
[...] Car l'ethnie, au sens moderne, n'est plus celle observée par l'ethnographe, société primitive qui vivrait indépendamment de la société moderne L'ethnie est devenu un phénomène moderne, elle a revêtu une autre acception, plus politique. Les Bosniaques sont une ethnie, les Kossoviens sont une ethnie. L'ethnie est construction politique (représentation, au sens lacostien), pré- nationale, pré-étatique. Une société pluri-ethnique est une société qui repose sur des fondements de purification ethnique. Et la culture est une pré-ethnie. D'où le danger, à mes yeux, de la notion de société multi-cuturelle. Mais nous voilà bien loin de race et histoire ouvrage pédagogique et intelligent. [...]
[...] En effet, voulant lutter contre le préjugé raciste, CLS remarque que ça ne sert à rien de démontrer l'inutilité d'affirmer la supériorité ou l'infériorité d'une race sur une autre si c'était seulement pour restituer subrepticement sa consistance à la notion de race, en paraissant démontrer que les grands groupes ethniques qui composent l'humanité ont apporté, en tant que tels, des contributions spécifiques au patrimoine commun Une telle entreprise aboutirait seulement à formuler la doctrine raciste à l'envers (p. 9). Là, je jubile. Tout est dit. L'ethnisme est un racisme qui s'ignore (à peine). [...]
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