La meilleure définition de l'art et de son rapport sensible, si tant est qu'on puisse en donner une semble être celle de Baudelaire lorsqu'il nous dit qu'une « œuvre faite n'est pas nécessairement finie et une œuvre finie n'est pas nécessairement faite » que cite explicite Merleau-Ponty dans Signes par « l'œuvre accomplie n'est pas celle qui existe en soi comme une chose, mais celle qui atteint son spectateur ».
Le rapport sensible est donc double, à travers la création artistique, mais aussi à travers la réception de l'œuvre. Pourtant, l'œuvre d'art devient de plus en plus objet de luxe, il obtient une valeur financière et ainsi semble échapper à notre regard en perdant sa valeur universelle. Notre rapport à l'œuvre d'art est conditionné par cette modification sociale : nous avons tendance à fréquenter les musées comme des lieux de culture, de représentation sociale et ainsi à perdre l'essence même de l'exposition.
Nous sommes donc face à un paradoxe : comment l'œuvre d'art peut-elle encore nous rendre sensible alors qu'elle est dénaturalisée ? Si elle le peut encore, à quoi précisément peut-elle nous rendre sensibles ?
[...] Sans cette détresse, sans ce trop-plein d'émotion, la pulsion créatrice pourrait ne jamais s'exprimer. L'art joue donc un rôle cathartique non négligeable et apparaît comme une nécessité, il nous permet de nous vider de ce trop-plein d'émotion et en ce sens, l'art nous permet donc de canaliser nos énergies corporelles et à travers la création artistique les expulser et ainsi pouvoir analyser de manière rétrospective nos sentiments et sensations. L'art permet donc de suspendre l'affect en proposant un exutoire et en cela est une expression de l'homme dans ce qu'il a de plus humain. [...]
[...] En d'autres termes, l'artiste est comme libre de se laisser aliéner par une puissance supérieure (mais n'est-elle pas seulement émanation de lui-même pour devenir autre et accéder à ce monde autre qui pourtant s'appuie sur le même. Et si l'art était émanation du moi profond, de mes sensations ? Effectivement, Nietzsche semble tout d'abord nous surprendre lorsqu'il dit la détresse est nécessaire et pourtant, il faut bien qu'il y ait un moteur de la création et dans bien des cas c'est ce que nous ressentons qui nous pousse comme une nécessité vitale, à l'art. [...]
[...] Histoire de l'art depuis les origines jusqu'à nos jours» par Charles Terrasse. Éditions H. Laurens (Paris, 1946-1953) . La force de l'art : histoire de l'art en Occident de l'an mil à nos jours» par Jean-Luc Chalumeau. Editeur : Cercle d'Art (Paris, 1993) . L'art en thérapie par Jean-Pierre Klein. [...]
[...] L'abstraction ne permet pas de saisir la signification spécifique de la chose et court ainsi le risque de nous rendre, elle aussi, insensibles. Alors que l'art doit nous permettre de voir les objets du réel avec un regard nouveau, de nous modifier et de modifier notre regard, en un mot d'exacerber notre sensibilité, il est mis face à une difficulté interne difficilement possible à dépasser. Le choix de privilégier l'abstrait au concret doit nous permettre de retrouver une sensibilité artistique, mais pourtant échoue, ou du moins semble échouer. [...]
[...] Pourtant, l'art apparaît comme nous rendant sensibles en notre âme, alors que le premier rapport, le rapport primitif à l'art se fait par les sens physiques (toucher, odorat Or, si l'art peut nous transcender psychiquement, n'est-il pas aussi en mesure de nous modifier physiquement ? L'art n'est pas une nécessité corporelle qui tient à associer le contact directement physique à la matière au spirituel ? L'acte même de produire une œuvre artistique nous propulse dans un monde autre. En effet, l'artiste peintre Matisse a été filmé pendant qu'il travaillait puis ralenti. [...]
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