« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Cette phrase constitue le premier article de la déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'ONU le 10 décembre 1948. Elle postule la liberté comme principe premier de l'existence de l'homme. C'est non seulement un principe inhérent à son être, mais aussi un droit « inaliénable », c'est-à-dire une garantie à faire valoir et qui ne peut lui être retirée. En ce sens, poser la question « qui est libre » peut paraître paradoxal, dans la mesure où celle-ci implique une différenciation des hommes au sein d'une homogénéité supposée. Cette question pose donc le problème de la réalisation effective de la liberté dans la vie humaine. Mais plus encore, se demander « qui est libre » revient à s'interroger sur les critères qui permettent de juger de la liberté, d'en mesurer la réalité. Se demander « qui est libre » revient donc à s'interroger sur les manifestations de la liberté, c'est-à-dire sur son objectivation éventuelle, voire sa normalisation.
[...] S'il existe une expérience de la liberté, comme se manifeste-t- elle dans la perspective d'une objectivation ? Ce problème de la réalité de la liberté, est posé par Kant dans Critique de la Raison Pure, et constitue la troisième des quatre antinomies que rencontre la raison, c'est-à-dire la confrontation avec un dilemme métaphysique insoluble. Dans le cas particulier de la liberté, la raison semble être prise dans des oscillations permanentes entre la thèse d'une causalité libre qui plaide en faveur de l'existence d'une liberté réelle, et l'antithèse qui veut qu'il y ait correspondance entre l'humanité et la nature, et où la causalité naturelle priverait l'homme de toute prétention à se déterminer lui-même. [...]
[...] En ce sens, le choix est tout sauf un acte de la sensibilité, c'est une décision prise de façon réfléchie, puisque qu'il n'y a pas d'équivalence entre ce que nous désirons et ce que ce que nous pouvons. Nous désirons par exemple le bonheur, mais nous ne choisissons pas d'être heureux à proprement parler. Selon la philosophie de l'action aristotélicienne, la liberté procède de la délibération réfléchie des raisons de l'action selon ce qu'il nomme le principe de prudence c'est- à-dire la capacité de déterminer ce qui est bon et utile pour soi. [...]
[...] Pour celui qui juge, le fou reste dans le domaine de l'arbitraire. Le fait que nous soyons des êtres sociaux, c'est-à-dire dans l'altérité, rend donc nécessaire la possibilité d'un discours objectif de la liberté, c'est-à- dire sa normalisation. A la question qui est libre l'on pourrait d'abord répondre que tout le monde doit être libre, dans la mesure où la liberté se trouve être la clé de voûte d'un système politique, moral et religieux qui la normalise, dans l'altérité, par le discours. [...]
[...] Or ce transfert d'une subjectivité à un objet de langage ne va pas de soi et il contient en lui-même des présupposés. En effet, supposer l'équivalence entre la subjectivité qui pose intérieurement des raisons et le discours qui en rend compte, c'est-à-dire les universalise en les rendant transmissibles, suppose l'existence d'un sujet qui soit source omnisciente de ses actes, c'est-à-dire un sujet raisonnable et, plus encore, totalement conscient. L'agent libre devient alors un sujet à qui rien n'échappe de son intériorité, et donc souverain de lui-même par la conscience omnisciente qu'il a des mouvements de son intériorité. [...]
[...] Le sujet autonome selon la loi morale est donc libre, non pas spéculativement mais en pratique, dans la mesure où il répond effectivement et positivement à l'exigence de l'altérité. De lui l'on peut dire qu'il est libre puisque sa liberté est objectivable, la loi morale de l'impératif catégorique étant universelle. Se dessine alors à travers le principe d'autonomie selon la loi morale l'idée d'une liberté intérieure qui se constitue comme un effort, un exercice perpétuel qui va à l'encontre d'un innéisme de la liberté. [...]
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