Comment comprendre l'évidence de cette liberté et de cette volonté, formes élémentaires de l'activité humaine ? S'il semble évident que je me saisisse moi- même au sein d'une intuition, cette pensée fait-elle de moi nécessairement un homme libre ?
[...] Il manifeste un élément essentiel de notre nature. Faut-il dès lors condamner l'espérance en une liberté fondamentale qui serait l'expression la plus élémentaire de la nature humaine ? Comme l'écrit Descartes dans la cinquième méditation : « Nous ne sommes pas en notre corps comme un pilote en son navire. » Il existe donc bien une question de la réalité corporelle de l'homme qu'il faut résoudre et comprendre. Le corps pour Descartes est une réalité conditionnée et déterminée par des lois de type mécanistes, il est une machine. [...]
[...] Penser l'homme, telle fut l'une des directions les plus importante des Méditations métaphysiques. Non penser l'homme en sa nature, mais le penser, sans le déterminer animal social, habile ou raisonnable. Pour Descartes, comme il l'écrit à la fin de la seconde méditation, établir l'élément qui permet de penser l'homme suppose de considérer son humanité à l'extérieur d'une définition circonstanciée de sa qualité, c'est-à-dire considérer l'acte de pensée comme fondement de sa nature. Chercher le fondement ne suppose plus que l'on cherche une définition mais le dévoilement d'un principe. [...]
[...] Cependant le dualisme, conséquence de cette position métaphysique, ne doit pas faire oublier les motifs et les émotions qui dirigent souvent malgré nous nos actions, à l'encontre de notre nature raisonnable. Il semble donc qu'il faille penser et comprendre cette seconde nature, formée de motifs et répondant à un ordre, une nécessité que peut dévoiler notre entendement. Comprendre cette nature passionnelle ce n'est pas amender où défaire l'enracinement de notre essence dans une liberté indépassable, mais c'est au contraire parvenir à réaliser pleinement cette liberté en comprenant notre condition humaine, souvent ambivalente et contradictoire. [...]
[...] La question qui se pose alors est de savoir dans quelle mesure l'élément fondamental de notre humanité peut de la sorte être ramené à notre pensée. Le dualisme cartésien du corps et de l'esprit ne condamne-t-il pas une autre expérience élémentaire et fondamentale de notre présence au monde, celle du corps ? Affirmer que l'élément fondamental de notre humanité repose sur la pensée que nous avons de nous- même, suppose que nous considérions notre existence comme manifestation de notre volonté et de notre liberté. [...]
[...] Le corps n'est donc pas que machine, il fonctionne aussi sous une certaine forme de l'esprit que Descartes nomme « esprit animal ». Cet esprit animal c'est la manière dont le corps agît sur l'esprit, le motif dont- il use pour imposer à notre volonté libre sa suggestion. Dans le Traité des passions, son dernier ouvrage, Descartes tente de comprendre et de dévoiler cette mécanique des motifs, qui loin de s'opposer à l'élément essentiel que constitue notre volonté, représente au contraire pour lui la plus pertinente preuve de son existence. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture