Nous avons désormais l'habitude d'opposer la culture humaniste tournée vers une connaissance de l'homme et du monde de l'homme à la pratique de la science tournée vers la connaissance du monde et sa maîtrise au moyen de la technique qui dérive du savoir scientifique.
La science semble donc d'abord avoir pour but de connaître le monde extérieur et non pas de se connaître elle-même. En effet, si la science se donne comme un ensemble d'énoncés vrais qui s'imposent comme autant de certitudes, une fois que je connais par exemple la loi de la gravitation universelle ou la loi de la transformation de l'énergie en masse, je n'ai plus rien à ajouter sinon à utiliser ces lois comme des théorèmes physiques (...)
[...] Le dialogue véritable entre le rationalisme et l'empirisme n'est pas le dialogue stérile et sans fin des philosophes appartenant à ces deux écoles, mais c'est le dialogue fécond du théoricien et de l'expérimentateur. Le théoricien doit posséder tout le passé mathématique de la Physique, autant dire toute la tradition rationaliste de l'expérience. L'expérimentateur doit connaître tout le présent de la technique. C'est ce dialogue qui permet de construire un rationalisme concret et de dépasser l'aporie philosophique d'une confrontation de l'empirisme et du rationalisme. A ce connaître elle-même, la science gagne de devenir philosophie et de féconder la philosophie. Bachelard constatait que la science n'avait pas la philosophie qu'elle méritait. [...]
[...] Il faut que la science se connaisse elle-même au sens où elle doit connaître ses fondements pour prétendre être telle. Descartes conçoit le savoir comme un arbre, c‘est-à-dire sous la forme d'une totalité organique et cette totalité s'origine tout entière dans des racines qui sont la métaphysique car seul un fondement métaphysique peut m'assurer que l'évidence du vrai n'est pas l'illusion qu'un malin génie causerait en moi. C'est pourquoi pour Descartes, un athée ne peut pas être bon géomètre car la connaissance qu'il a des mathématiques n'est pas une vraie science, par ce que toute connaissance qui peut être rendue douteuse ne doit pas être appelée du nom de science. [...]
[...] Il est donc impossible de concevoir une science qui n'ait pas une dimension réflexive car si on peut concevoir que l'esprit possède un contenu de façon immédiate, sans réflexivité et qu'il puisse utiliser ce contenu de savoir à des fins pratiques, il est par contre impossible que possédant de façon immédiate un contenu, l'esprit puisse définir ce contenu comme scientifique de façon normative. Une science qui ne serait pas consciente d'elle-même n'est guère plus qu'une opinion droite. Mais l'opinion droite suppose la science car qui, à part la science, peut dire de l'opinion droite qu'elle est droite ? [...]
[...] écrit-il dans ses Seconds Analytiques et on peut noter les formules réflexives : nous estimons posséder puis nous croyons que nous connaissons Les activités scientifiques sont conduites à partir de l'idée de la science. Il est de l'essence de la science d'être réflexive. Spinoza définit la méthode de la connaissance comme idée de l'idée dans son Traité de la Réforme de l'Entendement Avoir la science, c'est connaître avec méthode, c'est posséder l'idée de l'idée Il faut donc d'abord avoir un contenu de connaissance et ensuite de ce contenu de connaissance faire émerger la norme qui permet de lui conférer le statut de connaissance. [...]
[...] En devenant consciente d'elle-même à travers la sociologie, la science acquiert donc une dimension humaniste. La façon de penser positive est destinée pour Comte à informer la totalité de la vie sociale et à conduire l'Humanité sur la voie d'un progrès pacifié sur le chemin d'une maîtrise toujours plus grande de la nature. Au pouvoir spirituel du prêtre qui est un pouvoir qui divise et engendre les conflits entre les hommes, doit se substituer le pouvoir spirituel du savant positif qui est un pouvoir qui pacifie les relations entre les hommes. [...]
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