Jean-Jacques Rousseau, moi-même, amitié, aliénation, jugement, influence d'autrui
À la fin de sa vie, Jean-Jacques Rousseau en est réduit à la solitude radicale du promeneur solitaire ; son sentiment de persécution est tel qu'il trouve refuge au château d'Ermenonville où il va mener une existence insulaire : ainsi écrit-il dans la première promenade qu'il est « seul sur la terre », car il n'a plus « de frère, de prochain, d'ami, de société » que lui-même.
La communion avec la nature est une forme de consolation de cette condition terrible pour Rousseau, mais l'amitié d'autrui ne reste-t-elle pas nécessaire pour être soi-même ?
[...] Sans autrui, nous n'avons pas la possibilité d'avoir une conscience de soi objective. C'est-à-dire qu'en étant coupés des autres, nous pouvons toujours nous reconnaître des qualités et des défauts, mais cette reconnaissance est subjective et peut être biaisée par du narcissisme ou une illusion sur soi. Alors l'identité qu'on se reconnaît nous-mêmes est seulement subjective, là où l'intersubjectivité joue un rôle nécessaire pour un soi authentique. Aussi, sans autrui, sans société, notre humanité régresse, et nous nous retrouvons alors plus proches de la bête que de l'homme. [...]
[...] Pour lutter contre l'influence d'autrui sur notre personne, perçue comme un frein pour être vraiment soi-même, certaines personnes vont privilégier la solitude absolue, se couper entièrement de la communauté des hommes dans une recherche approfondie de soi-même. La présence d'autrui est une condition nécessaire pour être soi-même Malgré l'idée première selon laquelle autrui est un obstacle à notre existence authentique, on constate que l'intersubjectivité est cependant nécessaire à notre identité. Autrui est selon Sartre « le médiateur indispensable entre moi et moi-même ». C'est par autrui que nous accédons à une conscience de nous-mêmes, car les autres nous reflètent ce qu'est notre personne. Autrui est un miroir de nous. [...]
[...] On est rangé dans des catégories qui nous définissent, on efface alors la reconnaissance de l'individualité pour des raisons pratiques, ainsi on peut désigner et reconnaître ce que représente autrui et soi-même sans problèmes, au dépit de la complexité des êtres. Cette appartenance à une communauté d'homme nous empêche d'être vraiment nous-mêmes, en nous poussant à enfouir en nous tous nos défauts, qui sont pourtant une partie aussi importante que les qualités dans ce que nous sommes. Par ces cases réductrices de la complexité de notre être, on se sent dénaturé, nous rapprochant plus de l'objet que de l'humain dans l'œil d'autrui. [...]
[...] En ce sens, être complètement coupé d'autrui amène à une perte de soi-même et de la complexité de notre être. Pour conclure, nous avons d'abord vu qu'autrui peut être ressenti comme un frein, un obstacle à soi-même, du fait des normes et du jugement de la société qui nous pousse à une conformisation, puis nous avons vu que cependant, sans autrui, notre humanité régresse et n'avons plus l'intersubjectivité, qui est un facteur essentiel pour atteindre un soi authentique et être vraiment soi-même. [...]
[...] Puis-je être moi-même si je n'ai plus que moi-même ? À la fin de sa vie, Jean-Jacques Rousseau en est réduit à la solitude radicale du promeneur solitaire ; son sentiment de persécution est tel qu'il trouve refuge au château d'Ermenonville où il va mener une existence insulaire : ainsi écrit-il dans la première promenade qu'il est « seul sur la terre », car il n'a plus « de frère, de prochain, d'ami, de société » que lui-même. La communion avec la nature est une forme de consolation de cette condition terrible pour Rousseau, mais l'amitié d'autrui ne reste-t-elle pas nécessaire pour être soi-même ? [...]
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