Une idéologie est un système de représentation qui prend sa source dans la réalité sociale, mais qui se caractérise comme une représentation illusoire de cette réalité. Il ne s'agit pas d'une pure invention, et c'est pour cela qu'une idéologie peut fonctionner, car on croit voir et on intègre ce n'est qu'une illusion du réel. Cette illusion intègre des petits bouts de réel : par exemple, il est vrai que parfois les secrétaires épousent leur patron, cependant lorsque l'on fonde sa vie sur le souhait d'être une secrétaire afin de monter facilement dans l'échelle sociale, on prend de gros risques… Mais cela arrive quelque fois, et le réel peut alors faire croire qu'un jour on sera « l'heureux élu » ; en outre, on a envie de croire en une idéologie lorsqu'elle est agréable, séduisante. Les deux piliers de l'illusion du réel, de l'idéologie, sont ainsi l'intégration d'une impression de réel et le désir que cette illusion, ce « petit bout de réel » soit vrai.
[...] Si la consommation était quelque chose de durable, la publicité serait inutile, car l'appel incessant à consommer perdrait son sens. Cette absence de durabilité qui conditionne la publicité prouve qu'elle vise le plaisir comme jouissance immédiate, et non le bonheur, ce qui donne son caractère séduisant : c'est pour ça que cela marche. L'aveuglement du désir, qui est exalté à outrance, fait que l'illusion créée par l'idéologie fonctionne, et lorsqu'on est dans cette structure illusoire on ne s'en rend pas compte : une rupture est nécessaire. [...]
[...] La confusion du bonheur et du plaisir est dénoncée dès Platon : la jouissance dans l'instant n'a jamais structuré une vie, plus le plaisir de l'instant est important plus la destruction de la vie de l'homme selon son Essence s'accroît. La confusion entre la multiplicité des jouissances et le bonheur stable est ainsi destructrice de l'Idée de Bonheur : la publicité trompe volontairement en assimilant le second terme au premier. Selon Arendt, l'image et le discours publicitaire ont pour sens l'utilisation du désir et profitent de l'homme à des fins non humaines, qui se résument dans le progrès de la consommation. [...]
[...] Cette publicité présente ainsi le réel sous une forme qui éclipse un problème de fond, l'inégalité du pouvoir d'achat qui fait certains peuvent consommer selon ce modèle et d'autre non, et qui est la manière d'être de l'idéologie dominante dont les valeurs d'échanges et de profits sont fondamentales. La publicité présente ainsi une illusion de bonheur, en tant que système de représentation d'une idéologie qui, par définition, illusionne. En effet, en quoi est-on heureux lorsqu'on achète un portable ou un billet d'avion ? Le bonheur est ici confondu avec le plaisir immédiat. [...]
[...] Par exemple, un régime idéologique totalitaire présente une réalité déformée, au moyen de la propagande, qui justifie sa mise en place. L'idéologie est ainsi un emprisonnement dans un tout global, dont on ne se rend pas compte, car cela marche, selon les structures qui sont présentées, et rien n'est fait pour que l'on s'en détache. Le système de représentation du système idéologique stimule son propre objet : la publicité est une manière de stimuler le désir des consommateurs, car son but en soi est de faire acheter, et rien d'autre. [...]
[...] La société économique et sociale actuelle ne peut se développer sans la science, ce que la publicité ne signale pas, et le consommateur valide la mise à pas de la science fondamentale au profit de la science appliquée en préférant le scientifiquement prouvé : il s'agit d'un autre aspect déformé par le système de représentation de l'idéologie dominante. La généralisation de la publicité et son acceptation passive par la majorité de la population sont donc une validation du système dont ils ne saisissent pas les enjeux, le réel qui leur est présenté n'étant pas en adéquation avec la réalité. [...]
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