Le préjugé est, comme l'étymologie l'indique, un jugement précipité, très exactement un jugement "formé avant"..., mais avant quoi ? Avant, précisément, de disposer des éléments d'informations et justement des preuves qui permettraient de lui conférer une certitude rationnelle. Mais d'où vient cette précipitation ? Comment l'expliquer ? S'il ne s'agissait que d'un simple moment d'inattention ou de précipitation, il serait aussitôt éliminé par les réflexions et les connaissances qui viendraient combler l'ignorance. Or, et c'est justement le problème, le préjugé résiste aux arguments rationnels qu'on lui oppose. C'est donc qu'il trouve ailleurs que dans le raisonnement bien établi, fondé, la force pour s'affirmer. Ainsi, celui qui affirme l'inégalité des races n'entend pas les arguments que le scientifique lui oppose (...)
[...] On imagine bien, par exemple, un scientifique ou un philosophe qui, après s'être évertué à prouver, par exemple, que la notion de race humaine n'a aucun sens, se rend compte de l'impuissance des preuves qu'il avance. Celles-ci ne parviennent pas à contrer les arguments fallacieux du démagogue qui sait adroitement flatter les préjugés racistes de son auditoire. La question que le scientifique ou le philosophe viendrait alors à se poser est bien celle-ci Que vaut une preuve contre un préjugé ? Et sa réponse, fondée sur son expérience ne pourrait être que celle-ci : en fait, les preuves ne semblent pas valoir grand chose en face des préjugés. [...]
[...] Comment l'expliquer ? S'il ne s'agissait que d'un simple moment d'inattention ou de précipitation, il serait aussitôt éliminé par les réflexions et les connaissances qui viendraient combler l'ignorance. Or, et c'est justement le problème, le préjugé résiste aux arguments rationnels qu'on lui oppose. C'est donc qu'il trouve ailleurs que dans le raisonnement bien établi, fondé la force pour s'affirmer. Ainsi, celui qui affirme l'inégalité des races n'entend pas les arguments que le scientifique lui oppose. Non qu'il ne puisse les comprendre (ce n'est pas nécessairement une question de compétence intellec tuelle), mais parce qu'une force en lui les rejette. [...]
[...] La différence de valeur accordée à la preuve et au préjugé Elle tient à la psychologie de l'individu. Elle a son fondement sa raison d'être) dans la manière dont il vit son rapport au monde. L'homme du préjugé ressent l'objection comme une menace qui vient troubler son équilibre inté rieur; l'homme de la preuve l'accueille, au contraire, comme un élément qui lui permet de reformuler ou de corriger hypothèse incertaine. L'homme qui accorde plus de valeur au préjugé qu'à la preuve a une attitude fermée par rapport au monde ; il a peur pour sa tranquillité, son intégrité tant physique que morale ; il a une vie étriquée. [...]
[...] Une difficulté, pour la preuve, d'en venir à bout. Ceci étant, on admet implicitement que le préjugé n'est pas une simple erreur dont on se débarrasse dès lors qu'on nous met en face de la vérité. Il s'agit donc d'identifier et d'évaluer la force du préjugé, mettre au jour les raisons pour lesquelles ils nous aveuglent de façon telle que, même mis en face de l'évidence, de la réalité, nous n'abandonnons pas nos préjugés. Alors on pourra mesurer les chances de ces deux adversaires que sont preuve et préjugé puis, éventuellement, fournir à la preuve les armes qui lui permettront de vaincre le préjugé. [...]
[...] En quoi preuve et préjugés s'opposent ; 2. Pourquoi le préjugé apparaît plus puissant que la preuve. Pour faire de la philosophie, il ne faut donc pas en rester à un constat d'échec et se contenter d'énumérer divers exemples qui le confirment. En effet, a réflexion philosophique commence à partir du moment où l'on cherche à rendre compte de l'état de fait que les exemples ont permis de mettre au jour. Il s'agit de chercher à comprendre pourquoi il en est ainsi. [...]
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