Le problème du contrôle du pouvoir est un problème difficile parce qu'autant éthique que politique. Contrôler le pouvoir, c'est la tâche de ceux qui y participent (qui se doivent de vérifier les modalités de son exercice) mais plus encore celle des gouvernés qui, s'ils n'exercent pas ce contrôle, peuvent en être victimes : tout pouvoir, même légitime, porte en lui les risques de dépassement de sa légitimité et peut devenir violence, inhumanité ou simplement se retourner contre les intérêts du peuple qui l'a élu. Il s'agit donc de "mettre sous surveillance" le pouvoir.
Mais comment exercer ce contrôle ? Il semble qu'il faille pour contrôler le pouvoir contrôler la parole (...)
[...] Mais d'autres problèmes surgissent. Pressions financières, lois du marché de l'opinion, etc audimat encouragera à donner plutôt la parole à Le Pen qu'à un autre homme politique moins "audimatique", des pressions financières empêcheront de petites formations représentant le camp des ouvriers, de se présenter facilement aux élections ou d'éditer sa propagande, etc) + pressions inconscientes, implicites ou sous-jacentes : le pouvoir fait parler le pouvoir, les médias d'aujourd'hui (ou les courtisans d'hier) sont habitués à considérer comme légitime la parole "officielle" ou celle des candidats "autorisés" à parler et à leurs yeux "crédibles" : donc toujours le même petit monde, politique ou intellectuel, auquel les gens sont déjà habitués. [...]
[...] C'est aussi m'obliger à prendre part aux débats, m'introduire dans un espace que j'ai l'habitude de considérer comme réservé aux élites. Je transgresse donc une limite( non dite mais sous- entendue et respectée) qui est justement celle du pouvoir. Et dès lors il y a risque de dépassement : en effet, en prenant la parole, le peuple ne prend -il pas plus que la parole ? Car prendre la parole, c'est aussi prendre le pouvoir. Dès qu'il cesse de parler avec les mots du pouvoir, pour parler son propre langage, le peuple prend conscience de lui- même. [...]
[...] Contrôler la parole : celle des gouvernants : en instituant un vocabulaire adéquat au pouvoir, celle de la juridiction. Ce qui implique des institutions et une pratique de la juridiction. obliger les gouvernants à prendre des décisions en raison (relevant de la rationalité) Et celle des gouvernés : c'est le discours de la critique du pouvoir, qui permet de contrôler le pouvoir au nom de son propre discours. Mais le problème du contrôle de la parole par les gouvernés pose en même temps celui des conditions sociales d'exercice du langage. [...]
[...] Peut-on contrôler la parole sans en même temps remettre en cause l'idée même de pouvoir, c'est-à-dire la relation gouvernants / gouvernés ? 1. Nécessité d'établir un cadre d'exercice du pouvoir qui passe par des institutions, une juridiction et le respect des règles du discours démocratique : limitation des droits, justice et législation (qui oblige à respecter un texte le même pour tous) et non le bon vouloir d'un dirigeant. Exercer une surveillance du droit de parole : limiter le temps de parole des interventions des gouvernants, rendre permanente la libre confrontation, non seulement de tous ceux qui postulent au pouvoir mais aussi de ceux qui ne l'exercent pas et ne sont pas reconnus comme habilités à l'exercer. [...]
[...] Tout contrôle est coercitif, et se retourne donc en son contraire s'il se donnait pour but de permettre la limitation des abus et la libre expression de tous. Paradoxe : pour empêcher l'abus on crée des limites autoritaires. C'est le problème de la démocratie en général et des lois : la loi, en limitant et interdisant, permet la liberté. C'est le paradoxe de toute loi. La loi est coercitive mais sans loi règle une autre loi : la loi du plus fort . [...]
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