Bernays veut poser la question du platonisme en mathématique. Ce qu'il est d'abord nécessaire de remarquer, c'est que ce n'est pas lui qui a utilisé pour la première fois le concept de platonisme appliqué aux mathématiques, comme le souligne Jacques Bouveresse dans son allocution « Sur le sens du mot « platonisme » dans l'expression « platonisme mathématique » » prononcée lors de la conférence du 19 novembre 1998 à l'Université de Genève. Jacques Bouveresse évoque un « flottement terminologique » autour de ce terme, dont il ne s'agit certes pas de reconstituer l'histoire mais dont il est utile de distinguer les différents sens. Le sens généralement accepté est celui d'une option philosophique qui consiste à considérer –avec Platon - les objets mathématiques comme indépendants de notre activité de pensée et de connaissance. Avant Bernays, des penseurs comme Fraenkel et Heinrich Scholz ont réfléchi à ce platonisme mathématique, mais c'est surtout Poincaré qui a initié ce débat, en opposant les Cantoriens et les Pragmatistes (les premiers seraient platoniciens, ce que considère aussi Bernays). Un des problèmes fondamentaux, qui est tout à fait mis en évidence dans l'article de Bernays, est la tendance actuelle à considérer comme un synonyme l'expression « réalisme mathématique ». Pour Bouveresse donc, platonisme signifie un sens fort de ce réalisme, il affirme « l'indépendance des êtres mathématiques non seulement par rapport aux formes a priori de la sensibilité et a fortiori par rapport aux données de la connaissance sensible en général, mais également par rapport à l'intellect, y compris, pour ceux qui veulent être tout à fait cohérents, par rapport à un intellect divin ». Ce que fait ainsi ressortir Bouveresse, c'est l'exigence qu'une telle position philosophique recèle. De plus, il désigne deux types de problèmes que Bernays aborde tous deux et qui nous donneront une piste pour analyser sa position : un problème de type métaphysique, et plus précisément ontologique, concernant le mode d'existence des objets mathématiques (les objets mathématiques ont-ils oui ou non une existence qui est indépendante des opérations mentales par lesquelles nous réussissons à les atteindre ?) ; et un problème de type épistémologique, concernant le statut que la mathématique, dans sa pratique, donne à ses objets (de quels moyens disposons-nous réellement pour réussir à identifier les objets mathématiques et quels sont les objets mathématiques que nous pouvons espérer atteindre par ces moyens ?).
[...] I L'identification des philosophies mathématiques platoniciennes 1. Le problème de la totalité et du tiers exclu Les deux domaines dans lesquels se pose particulièrement ce problème sont ceux de la théorie des ensembles d'une part, fondée par Cantor et qui se base sur la définition de l'ensemble comme une réunion d'objets déterminés, associée à quatre règles, et de l'analyse infinitésimale d'autre part, étude de l'infiniment petit réapparue avec le formalisme grâce à l'analyse non standard de Robinson en 1961. Elles ont en commun de définir les objets d'une théorie comme les éléments d'une totalité. [...]
[...] Ce souhait de la non-contradiction comme critère de validation du formalisme, et donc du platonisme restreint, recouvre la recherche de la théorie de la démonstration de Hilbert mais Bernays prend acte de l'échec de ce projet, établi par Gödel : il est impossible de démontrer par les méthodes élémentaires la non-contradiction d'une théorie formalisée permettant d'exprimer toute démonstration, faite par les méthodes élémentaires combinatoires, d'une proposition arithmétique Il adopte donc un compromis assez original entre les différentes voies de platonisme de l'anti-platonisme franc au platonisme épistémologique assumé. Conclusion D'après Jacques Bouveresse, en réalité, platonisme mathématique signifie que les objets mathématiques ont autant d'indépendance vis-à-vis de notre esprit que la réalité physique. Ceci aurait pour conséquence de rapprocher énormément les mathématiques des sciences de la nature, comme la physique. Il est donc bien à comprendre comme un réalisme, par lequel les mathématiques cherchent à maintenir une notion de la vérité comme vérité- adéquation. [...]
[...] Le Platonisme en mathématique Bernays veut poser la question du platonisme en mathématique. Ce qu'il est d'abord nécessaire de remarquer, c'est que ce n'est pas lui qui a utilisé pour la première fois le concept de platonisme appliqué aux mathématiques, comme le souligne Jacques Bouveresse dans son allocution Sur le sens du mot platonisme dans l'expression platonisme mathématique prononcée lors de la conférence du 19 novembre 1998 à l'Université de Genève. Jacques Bouveresse évoque un flottement terminologique autour de ce terme, dont il ne s'agit certes pas de reconstituer l'histoire mais dont il est utile de distinguer les différents sens. [...]
[...] Finalement, la solution de Bernays est assez surprenante puisqu'il s'agit d'une sorte de pragmatisme et non plus d'un choix philosophique : à chaque partie des mathématiques semble convenir naturellement une option philosophique, comme si celle-ci se dégageait naturellement de l'objet d'étude. Ainsi, il conclut que l'intuitionnisme est adapté à la Théorie des nombres, la méthode à demi-platonicienne, qui se sert de l'idée de la totalité des nombres entiers mais évite les concepts quasi-combinatoires, est adaptée à la Théorie arithmétique des fonctions et le platonisme usuel est adapté à la théorie géométrique du continu Comment expliquer un tel procédé ? Bernays le fait lui-même : l'intuitionnisme se caractérise par son exigence concernant la méthode autorisée en mathématiques. [...]
[...] au degré le plus élevé du platonisme, la théorie des ensembles de Cantor qui par exemple est fondée sur l'axiome de l'infini qui garantit l'existence d'ensembles ayant une infinité d'éléments et qui ajoute à ses concepts quasi-combinatoires des procédés de réunion. Ce ne sont là d'après lui que trois formes de platonisme modéré ou encore pragmatique pourrait-on dire, c'est-à-dire en tant qu'il est utilisé ou nécessaire pour telle ou telle théorie. En ceci, il est simplement épistémologique. Bernays évoque ensuite la version forte du platonisme, qui sort de la pure épistémologie. le platonisme absolu, qui, cette fois, est un platonisme ontologique, sur lequel la mathématique n'a en fait pas réellement à se prononcer. [...]
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