"Jésus lui dit : Je suis le chemin, la vérité, et la vie" (Evangile selon Saint-Jean, 14:6).Dans cette brève formule réside la conception traditionnelle de la vérité selon la pensée judéo-chrétienne : celle-ci nous enseigne qu'une croyance en Christ peut nous conduire à Dieu - il est donc un chemin - ; Dieu constituant la vérité ontologique et logique de toutes choses, et étant source de vie. La vérité ontologique serait ainsi un horizon à atteindre, un but ultime, qui serait stable, unique, univoque et éternel (la vérité logique ferait référence à un discours adéquat à la réalité, s'opposant ainsi au mensonge). Le philosophe devrait donc chercher la vérité en tant qu'elle est dépassement des illusions (mensonges, erreurs et apparences).
[...] C'est ce que fait parfois Nietzsche dans ces œuvres, par exemple dans Ainsi Parlait Zarathoustra, dans le poème du prophète annonçant la mort de Dieu. La raison seule ne semble pas capable d'épuiser la richesse de la réalité sensible ; ainsi, la vérité peut s'exprimer plus clairement dans la création artistique. Nous pouvons conclure en revenant sur le rôle de la philosophie : celui de servir le peuple. Nous avons donc procédé à une analogie entre la philosophie et la médecine en tant que guérisseurs du malaise de la culture, d'après la philosophie nietzschéenne. [...]
[...] L'effort des philosophes et scientifiques serait le symptôme de la vie déclinante, décadente de notre civilisation. La croyance en l'existence d'une telle vérité est un poison d'une part car elle falsifie le réel, elle masque les différences entre les choses, nie leurs perpétuelles métamorphoses en leur attribuant une identité fixe. Elle est un poison d'autre part car elle empêche l'homme de s'interroger sur la nature des choses, de s'étonner- or cela semble être le principe de la philosophie car elle affirme froidement des concepts. [...]
[...] Premièrement, le philosophe ne peut pas user de la vérité comme remède, si l'on entend par vérité une identité fixe, unique, univoque, absolue, car cette vérité est intrinsèquement impossible à atteindre. En effet, le philosophe en quête de vérité est semblable au promeneur sur un chemin qui voudrait atteindre l'horizon. Cette idée de ‘la' vérité, telle que l'on conçue les philosophes se rattache à la recherche de l'essence première des choses, à la métaphysique, donc à la recherche de Dieu : or, selon la célèbre formule du Gai Savoir, ‘'Dieu est mort'' (paragraphe 125). Nietzsche pense ainsi la quête d'une vérité absolue est nécessairement vouée à l'échec. [...]
[...] Il nous montre également que nos connaissances (scientifiques) du réel sont fondées sur la méthode hypothético-déductive, c'est-à-dire sur l'empirisme ; or cette méthode a besoin de point de départ, celui-ci ne pouvant être obtenu que par la déduction. Il n'y a donc aucun moyen de prouver que le raisonnement hypothético-déductif est un moyen d'atteindre la vérité ontologique des choses. Si cette conception de la vérité partagée par la philosophie grecque et chrétienne ne peut pas être atteinte, et ne peut donc être utilisée comme remède ni pour la civilisation ni pour la philosophie elle-même, c'est peut- être parce qu'une telle vérité n'existe pas. [...]
[...] Nietzsche considère que la philosophie ne peut pas user de la vérité comme remède (car elle est par nature un poison), si l'on entend la notion de vérité selon la pensée traditionnelle. Néanmoins, la vérité peut être usée comme un remède dans le sens où elle veut dépasser les illusions de la pensée traditionnelle. En réalité, ce dépassement implique le fait que la philosophie, pour être elle-même remède, doive renoncer à la vérité et s'attacher à la vie elle-même. Nous pouvons tout d'abord dire que, contrairement aux autres philosophes, Nietzsche pense que la philosophie ne consiste pas à chercher une vérité ontologique unique, stable, éternelle, pour ensuite l'enseigner. [...]
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