Peut-on pleinement nous tenir responsables de nos désirs ? Lorsque nous ressentons un désir, doit-on nous tenir pour responsables de ses conséquences ?
[...] Sommes-nous responsables de nos désirs ? 1. Détermination du problème Définitions Le "désir" se définit classiquement comme une "tendance spontanée et consciente vers une fin connue ou imaginée" (définition de Lalande). On peut ajouter que cette fin est jugée comme bonne. La définition de Spinoza, "appétit avec conscience de lui-même", était également recevable. Il s'oppose à l'ennui, à l'inaction et à la satisfaction ; il se distingue de la volonté, de l'envie, de la passion, de l'ambition. La "responsabilité" désigne la relation entre un acte (considéré comme répréhensible - crime ou délit par exemple, mais également négligence, omission ou mise en danger délibérée) et une personne juridique appelée à répondre des conséquences de cet acte. [...]
[...] De surcroît, il est facile de montrer que notre intérêt le plus simple nous conduit à maîtriser nos désirs. Dans le Gorgias, Platon compare le désir au tonneau percé que les Danaïdes sont condamnées à remplir, absurdement, jusqu'à la fin des temps. L'aspiration au bonheur, exact contraire d'une existence absurde, nous pousse à maîtriser nos désirs et à nous en affirmer responsables Antithèse : nos désirs nous échappent L'idée selon laquelle nous maîtrisons nos désirs s'avère très contestable. "Vouloir" maîtriser ses désirs constitue, déjà, un désir, que nous ne maîtrisons pas, et pour cause ! [...]
[...] La réponse paradoxale oppose à cette idée l'argument selon lequel un pur phénomène psychologique échappe au pouvoir du droit, lequel ne peut reprocher que des actes avérés Argumentation de la thèse et de l'antithèse Thèse : nos désirs nous sont imputables Nos désirs nous appartiennent. Lorsque je désire, c'est bien moi qui désire, et nul autre. Dès lors, nous en sommes responsables. Du reste, le stoïcisme et l'épicurisme s'accordent pour affirmer cette maîtrise dont nous disposons sur nos désirs. En particulier, nous pouvons distinguer entre bons et mauvais désirs, entre désirs "acceptables" et désirs "inacceptables". On pouvait ici aisément élaborer ce point. [...]
[...] Une personne peut ainsi être tenue responsable des agissements d'autrui (les parents, des délits commis par leurs enfants ; les employeurs, des infractions commises par leurs préposés dans l'exercice de leurs fonctions). Une "responsabilité" quelconque s'avère donc toujours instituée au sein d'un système juridique donné. Suggérer qu'il pourrait exister une "responsabilité extrajuridique" constitue une tentative très contestable - et c'est bien ce que propose la question, telle qu'elle se trouve formulée. Sommes-nous responsables de nos désirs ? En droit français, non ; et en général, la question n'a pas de sens. [...]
[...] Le meurtre est répréhensible, la tentative de meurtre avec début d'exécution est répréhensible, mais pas la simple intention de tuer, encore moins un vague désir d'attenter à la vie d'autrui. Seuls les totalitarismes condamnent les pensées : dans un état de droit, la responsabilité n'est engagée que par des agissements avérés. Enfin, il était possible de signaler que la question pose un réel problème par rapport au fonctionnement même du système juridique. En droit, il est clair que l'imputation de la responsabilité s'opère de manière arbitraire. [...]
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