Communément, on désigne l'art de propagande comme étant une affaire liée aux régimes totalitaires qui sévirent au 20e siècle, par opposition à l'expression artistique libre qui est le fruit d'une création vaste et diversifiée où l'artiste exprime sans contraintes sa capacité à produire de l'art. On entend par « art de propagande » un outil à la disposition d'un pouvoir politique pour influencer son peuple dans l'exercice de sa gouvernance. La fin ultime de cet art de propagande est donc de rendre l'opinion d'une masse maniable. Dans l'optique de donner des exemples philosophiques et historiques de propagande artistique, nous traiterons, dans une première partie, de la valeur accordée à l'art par Platon dans la République en tant que simple objet de propagande ayant pour unique but la conservation d'une cité juste et bien équilibrée. Puis, nous nous appuierons des oeuvres cinématographiques d'Eisenstein afin de démontrer en quoi ses travaux sont le support de la propagande stalinienne. Pour, en dernier lieu, se pencher sur l'instauration du régime nazi en Allemagne et analyser la naissance d'un nouveau type d'art imprégné d'une volonté de propagande artistique.
[...] Son succès grandissant - il se croit lui-même investi d'une mission historique est le reflet d'une sensibilité collective, d'une attente et d'un espoir de renouveau chez un peuple avide de dignité nationale et de stabilité, qu'à ses yeux la République de Weimar ne semblait plus lui offrir. Hitler se propose de créer un Homme nouveau base nécessaire à l'édification d'une communauté raciale reposant sur la pureté du sang aryen et débarrassé de ses éléments corrupteurs. Dès son arrivée à la Chancellerie du Reich, le parti national socialiste s'empresse de consolider et de transformer son nouveau pouvoir en un pouvoir absolu étendu à l'ensemble de la population allemande. Commence alors la nazification des activités artistiques et culturelles. [...]
[...] Loin d'appartenir exclusivement au régime totalitaire du 20e siècle, la propagande artistique existe depuis l'apparition des premières cités politiques. L'art s'avère être un moyen très efficace pour embrigader une masse dans une idéologie. La propagande artistique est sans doute le moyen le plus pacifiste de faire adhérer une population à des idéaux aussi absurdes soient-ils. On assimile aisément l'idée d'art libre au démocratie libérale moderne. Néanmoins, ce type de gouvernance n'est pas à l'abri de toute déviance. Ne faisons-nous pas l'objet chaque jour d'une manipulation artistique médiatique véhiculé par les publicités qui nous inondent et nous formatent dans un style de vie et de consommation codifié par les multinationales ? [...]
[...] En ignorant l'intelligible, l'artiste ne peut alors pas créer une œuvre ayant une valeur ontologique. La beauté du poète, du peintre et du sculpteur n'est qu'une servile imitation des apparences sensibles, qui ne sont elles-mêmes que des images du divin. N'ayant pas de valeur en soi, il peut donc être instrumentalisé au service de valeurs supérieures. L'art n'a en lui-même aucun privilège au vrai mais n'est qu'un objet de propagande en vue du maintien de la cité juste platonicienne. Dans la République, au livre 10, Platon critique cette idée de l'art comme pure imitation. [...]
[...] Tout plan est articulé comme un langage et recherche un dynamisme qui rend la séquence émouvante. Après avoir filmé le massacre des civils par les forces tsaristes, Eisenstein met en scène le terrible sort d'une femme portant à bout de bras son enfant mourant. Le visage déchiré de cette femme éventrée par le sort qui interpelle le spectateur, ne pouvant qu'hurler son désespoir et sa colère. L'expression de ses traits sont poussés au maximum, le visage de cette femme est déformé par la souffrance. [...]
[...] En grand défenseur de la supériorité du monde intelligible et de la rationalité pure, Platon n'autorise donc à l'art que de jouer un rôle formateur de modélisation de l'âme comme le fait la gymnastique pour le corps. Ainsi, l'art n'est vu que comme un instrument, un outil de formation à la vertu. De ce fait, l'art est étroitement subordonné à l'éducation et à la politique. Aucun critère interne à l'art n'existe, l'œuvre est jugé par rapport à une finalité qui est celle de la cité. Elle ne vaut pas par elle-même mais selon la valeur de ce qu'elle imite, les modèles vertueux. L'art est mis au service de la cité et de son bon fonctionnement. [...]
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