Tout homme est un sujet humain, ce qui signifie que sa condition est aux antipodes de celle d'un objet. La notion de subjectivité renvoie à un être capable d'initiatives, un être que l'on ne peut réduire à l'obéissance aux lois de sa nature. Autrement dit un sujet est un être capable de rompre avec la nécessité qui le porte, capable d'être libre. Cette liberté émane d'abord de ce qui la rend autre qu'un objet : sa conscience. Il est un sujet libre parce qu'il a conscience de l'être, et cela le rend capable de décider, y compris contre ce qui le pousse à agir selon la nécessité.
[...] A l'évidence, la réponse est ici négative. Ma conscience me fait savoir quelle est ma volonté, c'est-à-dire en réalité ce que je désire, mais ce n'est pas elle qui extérieur; ce que je fais est toujours plus ou moins une réaction à ce qui m'entoure et la cause est extérieur à moi; certes je suis bien le sujet de mes actes au sens au c'est moi qui les accomplis mais je n'ai pas le pouvoir de les maîtriser entièrement; ce n'est pas parce que j'en suis l'auteur qu'ils coïncident avec une volonté libre que j'exercerais; celle-ci est une illusion de la conscience sur elle-même. [...]
[...] Spinoza explique que se qui commande en moi n'est pas une volonté libre mais une pluralité de désirs, comparables aux impulsions que peut recevoir un corps comme pierre. Ils peuvent entrer en conflit les uns avec les autres, ce qui explique, au moins en partie, l'expérience que nous avons d'éprouver parfois des sentiments et désirs qui se contrarient les uns aux autres. Freud rend compte de cela en invoquant une unité du moi, donc du sujet, qui est seulement une unité de surface. [...]
[...] Choisir, c'est accomplir un acte que l'on approuve au moment où on l'effectue. Mais en être l'auteur n'implique pas d'en être totalement la maître: c'est ce qu'explique Spinoza dans la Lettre de Schuller en faisant un détour par l'expérience imaginaire d'une pierre à laquelle on accorder ponctuellement de la conscience: celle-ci croirait libre sur la foi de ce que lui ferait savoir sa conscience, alors que nous savons bien qu'elle ne l'est pas, nous savons bien que, si elle est en mouvement, c'est seulement parce que une force extérieure à elle lui a donné une impulsion. [...]
[...] Autrement dit, il est indubitable que je suis le sujet de ma pensée et le doute est l'exercice de ma pensée critique, qui se trouve ici contre moi-même: au moment où je doute du doute lui-même, en allant, contre toute forme de croyance et de facilité, je ne peux qu'être certain que c'est bien moi qui fait cet effort de pensée: je suis le sujet de cette pensée et la conscience que je ne peux manquer d'avoir moi-même me le fait savoir. C'est bien là le signe que je suis le maître de cette pensée puisque c'est volontairement que je trouve le doute sur moi-même. [...]
[...] Mais l'homme ne peut prétendre maîtriser ce qu'il est ce qu'il fait selon le seul argument qu'il est sujet: il prend l'initiative de ses actes sans les décider entièrement, il n'en n'a pas la totale maîtrise; pour que ce soit le cas, il faudrait qu'il puisse maîtriser entièrement ce qu'il est et ce qu'il vent intérieurement, alors que sa conscience ne lui en donne pas le pouvoir. Ce qui constitue son unité de sujet et donc son intériorité, précisément parce que c'est son intériorité ne s'offre pas à lui comme un libre champ d'action. La subjectivité ne constitue donc pas une condition suffisante pour être maître de soi. [...]
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