Cours de Philosophie en trois parties sur le thème du devoir et du bonheur, thèmes récurrents au lycée et en études supérieures, ce cours en définit les principaux aspects.
[...] Il y a un devoir indirect de bonheur, ou du moins de rechercher le bonheur. Indirect car il ne se comprend que négativement : ni le contenu de la loi morale ne peut être la recherche du bonheur, ni l'accomplissement de la loi ne saurait donner le bonheur. Mais renoncer au bonheur, ce serait produire en soi les conditions d'une démission, d'un dégoût de vivre, d'un laisser-aller favorisant les manquements au devoir. L'homme blasé, qui sait à quoi s'en tenir et ne veut plus rêver de chimères, n'aura même pas droit à un à quoi bon L'espérance devient alors elle-même l'objet d'un commandement, d'un quasi devoir, condition d'une vie vertueuse. [...]
[...] DEUXIEME PARTIE LES SOLUTIONS FAIBLES DE L'ANTINOMIE 1 - Le grand mérite de la sagesse antique est d'avoir tenté de réunir bonheur et vertu dans le concept du souverain bien. Cette union va jusqu'à l'identité, de sorte que seule l'analyse peut distinguer ce qui en réalité fait bloc et ne peut être posé séparément. Ne retenons que les plus grandes figures, les plus populaires, celles des sages stoïcien et épicurien. Selon le stoïcisme, notre sujet n'a pas de sens : sa solution est toute comprise dans l'un ou l'autre terme, bonheur ou devoir, qui ne peuvent être un instant dissociés. Ainsi, le bonheur est la vertu même. [...]
[...] L'homme est homme jusqu'en sa naturalité. Ainsi, devoir renoncer au bonheur pour accomplir les commandements de la raison, c'est s'exposer à la misologie (la haine de la raison), c'est se résoudre à dénoncer la différence de l'homme et de la bête au profit de l'animalité, c'est faire de l'espoir de bonheur qui contribue à distinguer l'homme la cause principale de son malheur : le bien-être d'un être sans raison, par son effectivité immédiate, ne vaudrait-il pas mieux ? Mais inversement, renoncer au devoir, ce serait renoncer à ce qui rend l'homme digne de lui- même, ce serait sacrifier l'humanité rationnelle au bonheur : comment un tel bonheur serait-il encore humain, digne, souhaitable même pour un être qui s'en jugerait alors indigne ? [...]
[...] Aussi convient-il de ne pas fausser les termes de l'alternative : il ne s'agit ni de renoncer à l'animalité au profit de l'humanité, ni de satisfaire une nature au détriment d'une rigueur surhumaine. L'homme est tout entier homme en ces deux appels, et leur conflit est donc interne à l'humanité : ni le devoir n'est surhumain même s'il élève l'homme au-dessus de la nature et le fait participer au règne de la liberté ; c'est à ce titre qu'il conquiert son humanité qui n'est jamais donnée mais décrétée, œuvre d'une volonté. [...]
[...] L'union n'aura été obtenue qu'au détriment de l'un des termes : une vertu bien molle ou un bonheur bien rigoureux. Pourtant, le mérite des morales antiques est incontestable, c'est celui d'avoir formé l'idéal d'un souverain bien entendu comme l'impossible exigence d'une réunion du bien suprême (le plus haut en dignité, supremum : la vertu) et du bien complet (absolument plein, consummatum : bonheur du juste ou du sage). Ne peut-on conserver une force réelle à chacun des termes tout en affirmant entre eux une relation elle- même forte ? [...]
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