Etre libre, c'est faire ce que l'on veut. Je suis libre d'agir, en ce sens, quand rien ni personne ne m'en empêche. Cette liberté n'est jamais absolue (il y a toujours des obstacles) et rarement nulle. Même le prisonnier, dans sa cellule, peut ordinairement rester assis ou se lever, parler ou se taire, préparer une évasion ou courtiser ses gardiens ...
Et aucun citoyen ne peut, dans un Etat quelconque, faire tout ce qu'il voudrait : les autres et les lois sont autant de contraintes dont il ne saurait s'affranchir qu'à ses risques et périls. C'est pourquoi on parle souvent, pour désigner cette liberté-là, de liberté au sens politique : en quoi l'Etat constitue-t-il à la fois la première force capable de la limiter et la seule, sans doute, qui puisse la garantir ?
La liberté est plus grande dans une démocratie libérale que dans un Etat totalitaire. Et plus grande dans un Etat de droit qu'à l'état de nature : parce que la loi seule permet aux libertés des uns et des autres de cohabiter plutôt que de s'opposer, de se renforcer (même en se limitant mutuellement) plutôt que de se détruire. « Là où il n'y a pas de loi, remarquait Locke, il n'y a pas non plus de liberté. Car la liberté consiste à être exempt de gêne et de violence de la part d'autrui : ce qui ne saurait se trouver où il n'y a point de loi. »
L'Etat limite ma liberté ? Sans doute ; mais il limite aussi celle des autres, ce qui permet seul à la mienne d'exister valablement. Sans les lois, il n'y aurait que la violence et la peur. Et quoi de moins libre qu'un individu toujours effrayé ou menacé ?
[...] Or, aucun pouvoir n'est légitime s'il ne permet la libre expression des désaccords et une opposition. D'autre part, les analyses les plus remarquables de Tocqueville portent sur les périls qui menacent l'humanité à l'âge démocratique. En effet, la croyance en l'égalité intellectuelle de tous et la passion commune pour la sécurité et le bien-être ont leur revers : la valorisation des ambitions personnelles et des jouissances matérielles débouche sur un égoïsme destructeur de tout lien social comme de toute autorité. [...]
[...] N'est-il pas dès lors nécessaire de concevoir l'Etat autrement ? Le lien qui l'unit aux individus est-il purement instrumental ou peut-il être pensé comme un lieu substantiel ? L'individu se réalisant, non pas simplement grâce à l'Etat (et son pouvoir protecteur), mais en lui : telle est la conception qu'élabore Hegel. Il dit notamment : Ce qui façonne l'homme pour en faire un être libre, ce qui réalise la liberté et assure son maintien, c'est l'Etat. L'Etat est alors cette réalité substantielle qui donne forme et sens à l'existence individuelle, laquelle, laissée à elle-même demeure indéterminée. [...]
[...] S'agit-il de reconnaître une nature humaine à partir de laquelle seraient définis les droits dont chaque homme pourrait se prévaloir en tant qu'il est un homme ? Ou bien s'agit-il, sans référence à une nature humaine quelconque dont la définition soulève des controverses difficiles à trancher, des droits fondamentaux de l'individu tels qu'il les définit par lui-même au regard de sa seule liberté ? Hobbes, dans son ouvrage intitulé Léviathan, semble plutôt pencher dans ce second sens. Définir le droit naturel à partir de la liberté ou à partir d'une nature humaine déterminée complique la question de la légitimité d'une revendication des droits par la force. [...]
[...] L'Etat limite ma liberté ? Sans doute ; mais il limite aussi celle des autres, ce qui permet seul à la mienne d'exister valablement. Sans les lois, il n'y aurait que la violence et la peur. Et quoi de moins libre qu'un individu toujours effrayé ou menacé ? Le philosophe anglais Thomas Hobbes nous invite à faire une hypothèse : que se passerait-il si l'Etat ainsi que toutes les institutions qui dépendent de lui (la justice, la police ) disparaissaient du jour au lendemain ? [...]
[...] Chaque français, par exemple, est certes sujet de l'Etat, en tant qu'il est assujetti aux lois de ce dernier ; mais il est aussi, et surtout, citoyen en tant qu'il participe aux décisions souveraines de celui- ci par le biais de ses représentants (le parlement) ou directement (par exemple lors d'un référendum). De sorte que les hommes, en perdant leur indépendance naturelle, restent aussi libres qu'auparavant puisque, obéissant à la loi publique, ils obéissent à la loi qu'ils se sont eux-mêmes fixée. L'obéissance à la loi que l'on s'est prescrit est liberté affirmait Rousseau. Cette liberté politique est même plus digne de l'homme que la liberté naturelle, parce qu'elle est morale et fondée sur la conscience et l'obligation. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture