Autrui est-il autre chose qu'un obstacle ou un moyen ?

Résumé du document

Considérer autrui comme moyen, ce n'est pas exactement se demander ce qu'il nous apporte. D'une part s'interroger sur l'apport d'autrui dans notre existence conduirait à une liste aussi fastidieuse qu'inutile et vaine car chacun d'entre nous doit presque tout à autrui (sous la forme de l'éducation, de l'instruction, de l'acculturation, de la tradition etc.). D'autre part autrui peut nous apporter sans que nous le considérions comme moyen. Ainsi l'enfant ne considère pas ses parents comme des moyens. Il vaut donc mieux s'en tenir au sens strict du mot moyen et considérer qu'autrui devient un moyen quand nous l'utilisons. Le rapport utilitaire est celui qui voit en toute chose un simple moyen. Utiliser autrui c'est donc voir en lui l'instrument grâce auquel je parviendrai à mes fins. Dans cette perspective, le rapport à autrui est plus apparent que réel. Commandée par l'intérêt égoïste la relation utilitaire ne nous fait pas sortir de nous-même vers l'autre, mais elle nous ramène constamment à nous-même.

Le rapport utilitaire à autrui culmine évidemment dans l'esclavage. L'esclave est considéré comme « instrument animé » (Aristote) et propriété du maître au même titre que ...

Extraits

[...] En l'occurrence il s'agit de mes fins qu'autrui empêche ou favorise lorsque je le vois comme obstacle ou moyen. Par conséquent l'application à autrui de ces catégories est commandée par la logique de l'intérêt particulier, sinon même de l'égoïsme (dans la mesure où il ne s'agit que de centrer l'autre sur soi). ( Se demander si on peut considérer autrui autrement que comme obstacle ou moyen, c'est finalement se demander si on peut considérer autrui de façon désintéressée, et si une relation non égoïste à l'autre est possible Autrui comme obstacle ou moyen. [...]

[...] Ainsi Marx a tendance à considérer le salariat comme la forme moderne de l'esclavage puisque l'ouvrier entretient sa vie pour travailler à accroître la richesse du détenteur des moyens de production. ( Autrui comme obstacle La notion d'obstacle évoque celle de rapports de force ou de conflit. Tandis que le moyen va dans le même sens en me reliant aux fins que je poursuis, l'obstacle me sépare de mes fins en entravant, empêchant, contrariant mon action. On peut penser au conflit radicalisé par Hobbes dans l'hypothèse d'un état de nature conçu comme état de guerre où chacun est un loup pour les autres. [...]

[...] Pour cette raison nous ne pouvons dire à strictement parler que nous aimons le vin car nous ne lui voulons aucun bien. Ainsi ceux qui ont de l'affection l'un pour l'autre en raison du profit qu'ils pensent en tirer ne s'aiment pas pour eux-mêmes, mais à cause de l'avantage espéré. De même pour ceux dont l'amitié est inspirée par le plaisir. Ainsi ne chérissent-ils pas les hommes d'esprit pour ce que ceux-ci sont en eux-mêmes, mais en fonction de l'agrément qu'ils procurent. [...]

[...] N'est-il pas rendu suspect par le désir qui fait d'autrui un objet ou un moyen de satisfaction ? Sans doute ; mais il existe fort heureusement des formes d'amour au-delà de tout soupçon, comme l'amour d'une mère pour ses enfants. La mère veut réellement le bien de ses enfants et ne cherche pas d'abord en eux son propre bien. Ni obstacles ni moyens elle verra plutôt dans ses enfants une fin à laquelle il faudra se sacrifier si nécessaire. ( Le respect Est-ce à dire que seul l'amour puisse sauver les rapports humains de l'instrumentalisation ? [...]

[...] Le rapport utilitaire est celui qui voit en toute chose un simple moyen. Utiliser autrui c'est donc voir en lui l'instrument grâce auquel je parviendrai à mes fins. Dans cette perspective le rapport à autrui est plus apparent que réel. Commandée par l'intérêt égoïste la relation utilitaire ne nous fait pas sortir de nous-mêmes vers l'autre, mais elle nous ramène constamment à nous-mêmes. Le rapport utilitaire à autrui culmine évidemment dans l'esclavage. L'esclave est considéré comme instrument animé (Aristote) et propriété du maître au même titre que les biens et les animaux domestiques. [...]