« Nul n'est méchant volontairement » dit Socrate dans Hippias majeur. En effet, celui qui agit mal non seulement ignore la valeur de ses actes, mais est aussi malheureux parce que tout homme veut naturellement le bien.
Poser la question de savoir si on eut vouloir le mal, revient à se demander s'il est possible d'établir des rapports entre la volonté et le mal. La volonté en général permet d'assembler des forces en vue d'une action ; elle peut donc être ce que veut quelqu'un et sa traduction par une action effective, conformément à son intention. Mais vouloir consiste aussi à se déterminer librement en connaissant clairement les raisons et les conséquences de notre acte. Quoi qu'il en soit, la volonté est toujours affirmative, positive, en tant qu'elle s'oppose à la passivité. Le mal quant à lui est l'objet de désapprobation ou de blâme ; le mal physique, moral ou ce que Kant appelle « troisième antifinal » se regroupent essentiellement sous le mal moral. Il est nuisible car contraire à la loi morale, à la vertu ou au bien. En ce qui concerne le mal métaphysique, nous ne pouvons pas le vouloir car il ne dépend pas de nous.
Se pose alors la question de savoir si les termes « vouloir » et « mal » sont contradictoires, si nous sommes – en tant qu'être raisonnables – autorisés à vouloir le mal, et si nous sommes capables de le réaliser. Si vouloir c'est être au principe de ses actions, alors on pourrait dire que faire le mal est forcément un acte de la volonté. Mais si vouloir dépend avant tout d'un strict choix de la raison, celle-ci en tant que fondatrice des principes du bien et du mal ne peut pas vouloir le mal. Mais si la volonté est un principe vital, une affirmation, comment peut-elle vouloir le mal ?
[...] Il y a une participation de la volonté, mais cela est tout de même différent que de vouloir le mal pour le mal. Souvent, quand l'homme veut le mal, c'est parce qu'il est influencé par le monde sensible, que son intérêt particulier et que ses désirs sont placés au premier plan. En effet, l'homme est non seulement un être rationnel, mais aussi un être sensible, et c'est justement en tant qu'être sensible qu'il eut vouloir le mal. Sa volonté n'est as dans ce cas déterminée par la raison ; c'est ce que Kant appelle l'hétéronomie de la volonté Ce n'est pas une volonté pure au sens où ce n'est pas la volonté qui se donne à elle-même la loi, c'est l'objet qui la lui donne par son rapport à elle. [...]
[...] Peut-on pour autant dire qu'il ne voulait as faire ce qu'il haïssait ? Si l'on considère comme Aristote au chapitre I du livre III de L'éthique à Nicomaque que faire volontairement quelque chose, c'est simplement être au principe de nos actions, alors nous voulons toujours ce que nous faisons. Ainsi, lorsque nous commettons le mal, nous le voulons : c'est volontairement que l'homme agit ; la cause qui fait mouvoir ses organes réside en lui ; or avoir en soi-même le principe de ses actes, c'est avoir aussi en soi la possibilité de les exécuter ou non. [...]
[...] Il est donc contradictoire pour un vivant de vouloir le mal. Seul le malade, le faible, incapable d'extérioriser sa puissance le peut. Il intériorise sa volonté de puissance, c'est le sentiment des impuissants contre les puissants qui crée la volonté de néant. Cette dernière constitue l'énergie créatrice originelle des valeurs pourvoyeuses de vengeance et de haine de la vie. Du point de vue de la vie, le bien pourrait être ce qui la promeut, le mal ce qui la dégrade. [...]
[...] Mais vouloir le mal devient totalement impossible lorsque la volonté elle-même est remise en cause, et que le mal n'existe que relativement à un groupe qui ne fait que subir les agressions d'un monde extérieur auquel il est totalement incapable de s'adapter. Ainsi, vouloir le mal est impossible pour un homme sain, seul le malade, le minable peut vouloir le mal, mais il s'agit alors d'un renversement pathologique d'une puissance affirmative totalement indépendante qui la subit. [...]
[...] Idem, 3ème section. effet, pour Kant nous sommes libres quand nous n'obéissons pas à nos penchants sensibles, mais à notre raison. Il faut donc que celle-ci pose des règles pour que nous puissions agir conformément à notre nature rationnelle. La raison fait donc ses propres lois qui sont par conséquent universelles et rationnelles ; c'est en cela que la volonté est autonome. L'autonomie de la volonté est cette propriété qu'à la volonté d'être à elle-même sa loi. Idem, 2ème section. [...]
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