Le mythe d'Icare qui s'envole à l'aide d'ailes de plumes et de cire que le soleil fera fondre, causant sa perte, témoigne d'un certain désir de l'homme de dépasser sa condition et de porter son désir justement sur ce qu'il ne pourra jamais obtenir. Le désir étant justement ce qui ne se satisfait pas de l'obtention de son objet, il est presque logique que l'impossible fasse l'objet d'un désir comme s'il était par essence l'objet, l'horizon de tout désir. Le désir est au ban des accusé, lui qui dérègle la vie humaine en nous conduisant du « toujours plus ». C'est pourquoi lorsqu'on donne priorité à la raison, on peut vouloir s'en débarrasser, le réguler, le sublimer.
[...] Que serions-nous en effet sans la poursuite incessante des désirs? Rousseau dit en ce sens : " l'homme qui n'a rien à désirer est à coup sûr plus malheureux que celui qui souffre Spinoza inverse la perspective selon laquelle le désir serait manque et négativité. Il est, sans doute, le philosophe qui affirme le plus vigoureusement la valeur et la positivité du désir. Au lieu de penser le désir comme subordonné à la valeur de la chose désirée, Spinoza considère au contraire le désir comme producteur de valeur. [...]
[...] Cependant, il faut aussi reconnaître la beauté de l'austérité et ne pas la réduire à une simple mortification. La recherche débridée de la satisfaction de tous les désirs ne donne pas de vrai contentement, parce qu'elle détruit, parce qu'elle engendre de l'insatisfaction, précipite le dégoût et l'ennui. La sagesse doit forcément se laisser enfermer dans une alternative du tout passionnel ou du tout rationnel ? Plutôt qu'une vaine maîtrise des désirs, la sagesse ne consisterait-elle pas dans la compréhension des désirs et de leur équilibre ? [...]
[...] C'est le sens, chez Platon, de l'image du "tonneau des Danaïdes " (Gorgias), qu'on s'efforce de remplir alors qu'il est percé. Se déplaçant d'objet en objet, il est illimité, ou condamné à l'insatisfaction ce qui révèle sa nature irrationnelle. Excessif et assujetti à l'instabilité de son objet, le désir sensible apparaît contradictoire et dangereux. On retrouve ce qui fait le point commun entre le besoin et le désir: le manque. Mais on a aussi ce qui en fait la différence : le besoin peut être satisfait, le désir ne le peut pas. [...]
[...] Ainsi nombreux sont les philosophes à estimer que l'homme est capable d'user de sa raison pour ne pas être esclave de ses désirs. Cependant aujourd'hui il n'est pas rare que chacun soit invité à être à l'écoute de ses propres désirs pour favoriser son épanouissement. Dans les deux moments qui précèdent, nous nous sommes appuyés sur une certaine tradition qui condamne et rejette le désir et pour laquelle il est essentiellement manque et négativité ? Mais le désir ne peut-il pas être également positivité ? La raison doit elle vraiment chercher à la maîtriser ? [...]
[...] Celui qui donne son accord à la nature est heureux. Suivre l'ordre du monde, c'est suivre la raison. L'idéal stoïcien est donc la mort des désirs et des passions considérées comme des maladies. Si nous n'avons aucun empire sur le cours des choses, nous pouvons vaincre nos passions. Cela dépend de nous et l'empire sur les passions fait partie de notre liberté. Ce n'est pas par la satisfactions des désirs que s'obtient notre liberté mais par le destruction du désir (extrait des Entretiens d'Epictète). [...]
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