De toute part il est commun d'entendre
l'expression « Je me mets à ta place ». Elle est souvent employée d'un ton compatissant, dans un objectif qui se veut de rassurer l'autre… Cependant, nous est-il réellement possible de nous mettre à la place d'autrui ? Les situations, les caractères sont-ils toujours transposables ? La compréhension totale de l'autre, absolument requise pour prétendre se mettre à sa place, est-elle vraiment atteignable ? En bref, peut-on se mettre à la place de l'autre ?
Au premier abord, je me sens similaire
aux autres, j'ai l'impression de les connaître, de partager de nombreux points communs… Se mettre à la place de l'autre semble alors à la portée de tout un chacun.
D'abord, l'être humain a tendance a procéder par analogie : « tel je suis, tel est l'autre » pourrait d'ailleurs résumer cette attitude. Parce que je connais la façon dont j'extériorise mes émotions (honte, tristesse, colère) et que je vois les expressions d'autrui qui correspondent aux miennes en de pareilles situations, je vais conclure à une émotion identique. Si mon voisin pleure, parce que moi quand je suis bouleversé je pleure, je vais en conclure des émotions similaires chez lui. Il s'agirait donc d'une compréhension immédiate d'autrui.
[...] C'est renier ce qu'il est, ce qui fait de lui un sujet libre, une subjectivité, un homme. Cette réduction d'autrui à néant en quelque sorte est en fait une perte de l'identité. Chez Heidegger, dans son texte sur les risques de la culture de clan, cette idée apparaît aussi. Tous sont identiques à force d'être anonymes On a comme un effet de clonage. Le risque est le passage d'un je tu à un on où personne ne se reconnaît. Vouloir se conformer aux autres, se mettre à leur place, c'est risquer la dépersonnalisation. [...]
[...] Peut-on se mettre à la place de l'autre ? De toute part il est commun d'entendre l'expression Je me mets à ta place Elle est souvent employée d'un ton compatissant, dans un objectif qui se veut de rassurer l'autre Cependant, nous est-il réellement possible de nous mettre à la place d'autrui ? Les situations, les caractères sont-ils toujours transposables ? La compréhension totale de l'autre, absolument requise pour prétendre se mettre à sa place, est-elle vraiment atteignable ? En bref, peut-on se mettre à la place de l'autre ? [...]
[...] On en conclura donc que se mettre à la place de l'autre n'est pas possible, ce n'est qu'une fiction langagière. Je ne peux que prétendre me mettre à la place de l'autre, ce qui n'est absolument pas édifiant pour lui, bien au contraire. Je le prive (et par la même je me prive aussi) de ce qui rend humain Je le chasse en prétendant me mettre à sa place. Nous terminerons en citant Mounier et en nous accordant avec lui pour dire que la relation à l'autre n'est réellement envisageable que si on le considère comme un sujet libre, tout comme nous, et que nous n'essayons pas d'en faire une chose. [...]
[...] Dans un premier temps, nous avons vu que l'homme partage de nombreux points communs avec autrui : des émotions, des comportements, des affects, des désirs similaires, sans oublier sa nature. Cependant, suffit-il de connaître l'autre, en se basant sur des ressemblances, pour pouvoir se mettre à sa place ? N'y a-t-il pas des éléments qui viennent empêcher cela ? Et la connaissance que l'on a d'autrui est-elle véridique ? Qu'en est-il de la relation à l'autre ? En vérité, la connaissance d'autrui n'est pas forcément possible, si on y réfléchit bien. [...]
[...] Il n'y a pas d'égalité possible, ainsi se mettre à la place de l'autre n'est pas envisageable sauf à l'issue d'une lutte à mort ! Il apparaît donc que la relation à l'autre, notamment la connaissance d'autrui, est bien moins certaine qu'il n'y paraissait au premier abord Situations et tempéraments empêchent une assimilation à l'autre, la saisie médiate d'autrui ne nous amène qu'à une connaissance de nous et la relation à l'autre est toujours déséquilibrée Ne peut-on alors jamais se mettre à la place de l'autre ? Tenter de se mettre à la place de l'autre présente des risques. [...]
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