A l'heure où la toile grouille de sites tels Facebook permettant aux personnes de mettre en ligne leurs photos, commentaires, et autres péripéties de leur quotidien, il semble possible de partager sa vie avec certains de nos amis, bien qu'ils soient éloignés dans l'espace. L'expression « partager sa vie » renvoie d'abord à une vie en commun, avec une personne. Partager sa vie, c'est généralement vivre sous le même toit, bien que cela ne suffise pas. Des enfants et des parents peuvent vivre sous le même toit, mais ne partagent pas leur vie. En général, cette expression renvoie à une vie de couple lorsque le partage de la vie relève d'une décision de plein gré.
Dès lors, la question posée, dans les faits, semble immédiatement impliquer une réponse positive : oui, nous pouvons partager notre vie lorsque nous décidons de vivre avec une autre personne. Pourtant, le verbe partager n'est pas exempt d'ambigüité. Pouvoir partager sa vie, c'est l'avoir en commun avec quelqu'un, comme l'on partagerait une opinion ou un avis, c'est aussi pouvoir en la diviser en parties, c'est enfin, pouvoir céder chacune de ses parties.
Toutefois, dans quelle mesure peut-on considérer que la vie est quantifiable pour pouvoir être partagée ? N'y a-t-il pas une dimension de notre vie qui échappe à tout partage en ce qu'elle échapperait toujours à l'autre ? N'est-il pas absurde que de vouloir partager l'acte même de vivre, alors que je suis le seul à pouvoir vivre ma vie ?
[...] Partager sa vie, c'est généralement vivre sous le même toit, vivre en couple. Partager sa vie est alors presque synonyme de partager son quotidien avec quelqu'un. Deux individus qui ont choisi de passer le restant de leur jour ensemble. Toutefois, cette perspective circonscrit la vie au quotidien partagé. Or partager le quotidien d'une autre personne ne garantit pas la connaissance de sa vie, et l'on peut partager sa vie sans partager son quotidien. L'on pourrait vivre dans l'indifférence, sans s'interroger sur sa vie, sur la vie en général. [...]
[...] Dès lors, peut-on toujours partager sa vie en la divisant en plusieurs parties ? Pourrait-on aller jusqu'à dire que l'on peut partager sa vie et céder chaque part ? Il est possible de partager sa vie, comme il est possible de partager les honneurs, de partager un bonheur, de partager une opinion. Cela signifie alors que les honneurs, le bonheur, l'idée ou l'opinion sont en commun. C'est alors en ce sens, non pas en ce qu'elle est quantifiable et divisible, mais en ce qu'elle serait commune que la vie pourrait se partager. [...]
[...] Dans cette perspective, peut-on toujours partager sa vie ? Le projet de l'être vivant (ce en quoi il diffère de la machine), c'est le projet de reproduction. Dans la logique du vivant (1970), François Jacob nous montre qu'il est possible de concilier les deux visions, celle d'un mécanisme et d'un finalisme par le biais du programme héréditaire : la notion de projet ; bannie par le mécanisme est désormais une notion centrale de la science. L'hérédité se décrit en termes d'informations, de messages, de codes : ce qui est transmis de génération en génération, ce sont des instructions spécifiant les structures moléculaires. [...]
[...] L'action morale requiert une expérience d'identification, or c'est là le phénomène de la pitié. Le don des larmes correspond à l'humilité de s'avouer désarmé. Seule la pitié peut rétablir la solidarité entre les individus réalité à laquelle tous participent. Unité sentie par le peuple et comprise par le philosophe. Seule elle peut nous conduire à l'essence indivise des êtres. La vie étant douleur, la participation à la vie d'autrui est participation à sa douleur : c'est la définition très exacte de la pitié. [...]
[...] Le partage de sa vie est possible en sacrifiant une partie de soi, pour sauver une autre personne, ce partage est nécessairement partiel, puisque l'on ne pourrait se séparer d'une partie indispensable à notre propre survie, sauf en cas de sacrifice extrême. Mais jusqu'où peut-on partager sa vie ? Pour Schopenhauer Le vouloir-vivre, est un mouvement permanent, éternel qui tend à la reproduction sans fin des individus et des espèces. Cette force est aveugle, sans fin, sans cause, sans raison, et sans terme. La vie humaine est la plus douloureuse forme de la vie. [...]
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