L'ampleur de la problématique d'une pénalisation de la société ne semble cependant avoir été perçue que par une faible partie de la population ; en atteste la pauvreté de la définition de la pénalisation donnée par le Petit Larousse qui ne s'attache qu'à la définir dans une première acception selon le vocabulaire sportif, et dans une seconde comme le fait d'être désavantagé. L'interrogation portera en réalité sur le point de savoir quelle place occupe le droit pénal, et de facto le juge pénal, par rapport aux autres modes de régulation économiques et sociales. Une régulation des problèmes sociaux assurée dans une large mesure par les politiques pénales conduira à remettre en cause le contrat social tel qu'il est décrit par Rousseau. Abandonnant ses politiques sociales l'Etat deviendrait alors cette entité sécuritaire de la pensée de Hobbes.
Il conviendra dans un premier temps de caractériser cette émergence d'un nouveau paradigme qu'est celui de la pénalisation du social (I) avant de mettre en évidence qu'il est le fruit de profondes mutations sociales (II)...
[...] Il s'est attaché à étudier les politiques pénales avec les outils traditionnels d'analyse des politiques publiques, aboutissant à une conceptualisation du processus de pénalisation. Une première phase, résultant de cette analyse séquentielle, se caractérise par "la mise en forme de matrices théoriques par les acteurs du champs pénal structurés en communautés épisthémiques pénales". Ces matrices seront autant de paradigmes, nécessaires à la lutte contre la déviance et le crime, à la disposition des décideurs politiques. A ce stade le rôle des professionnels du droit pénal (universitaires et praticiens) est fondamental dans la mesure où il contribue à construire le référentiel pénal sur lequel s'appuieront les choix politiques ultérieurs. [...]
[...] Ce dessin est confirmé par les orientations pénales du gouvernement Rafarin. A la question d'une pénalisation de la société il convient de s'interroger sur l'existence d'une éventuelle césure historique. Or de prime abord on remarque que l'évolution historique ne se révèle pas linéaire. Ainsi si la monarchie de Juillet semblait plus sensible aux difficultés sociales cachées derrière la délinquance, le second empire parait plus répressif. Puis la fin du XIX siècle se montre être plus compréhensif mais le changement ne se produit véritablement qu'après la seconde guerre mondiale avec l'épanouissement des thèses de la "nouvelle défense sociale". [...]
[...] Ces dernières conduisent à appréhender la réalité criminelle par le prisme des sciences sociales afin d'humaniser la politique pénale et pénitencière. L'école de la défense sociale nouvelle pose le prima de la prévention sur une répression ne visant qu'à l'expiation et à la punition. Ainsi serait permise une protection générale de la société concomitamment au reclassement des condamnés. L'individualisation des peines se révèle alors être fondamentale, elle doit permettre la prise en compte de la personnalité du délinquant. Enfin elle dénonce la prison comme étant criminogène. [...]
[...] Ce sentiment va se cristalliser sur la catégorie d'actes clairement identifiables et universellement condamnés que sont les crimes. Cette stigmatisation focalise l'angoisse et en même temps masque l'impuissance des pouvoirs publics à gérer la crise profonde. Ainsi peut être compris l'intérêt qu'ont les décideurs politiques d'entretenir ce sentiment d'insécurité, de cela résulte une pénalisation accrue du social. En conclusion, la pénalisation du social pose une interrogation fondamentale, celle du risque que pourrait engendrer cette évolution, qui parviendrait à remettre en cause l'équilibre même de la société et, à terme aurait pour conséquence ultime son implosion. [...]
[...] Cette évolution s'explique par des causes multiples dont la pertinence permet la vérification mais aussi la compréhension du phénomène. II- LA PENALISATION DE LA SOCIETE FRUIT DE PROFONDES MUTATIONS ECONOMIQUES ET SOCIALES Les bouleversements sociaux, faisant disparaître les référentiels traditionnels, nécessitent que de nouveaux soit créés pour s'y substituer cela se fera par la pénalisation de la société qui servira également de réponse à une crise économique. La pénalisation moteur de l'émergence de nouveaux référentiels. "La Cité existe moins par sa réalité extérieure que par l'idée d'une communauté d'hommes réunis grâce à l'opinion engendrée par la loi et l'éducation" affirmait déjà Platon dans La République, plus de trois siècles avant Jésus-Christ. [...]
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