Droit au bonheur, Primo Levi, malheur absolu, idées humanistes, sociétés modernes, individualisme, Révolution française, dissolution du lien social, utopie, émancipation politique, bonheur collectif
Dans Si c'est un homme, Primo Levi constate, à partir de l'expérience concentrationnaire vécue, que le malheur absolu n'existe pas. En effet, il existe toujours de petits événements quotidiens tels que le froid, la faim ou la peur qui sont autant de dérivatifs au malheur absolu et qui rendent de ce fait supportable la vie au camp en empêchant de sombrer dans un désespoir profond. Il en déduit de même que le bonheur absolu n'existe pas et que des faits, en soi, plutôt anodins comme le fait d'avoir moins froid, d'obtenir un supplément de soupe, constituent pour lui, dans sa vie au camp, des moments de bonheur intense.
[...] La Révolution française constitue un tournant décisif puisqu'elle fait advenir une conception du bonheur radicalement nouvelle ouvrant la voie à la revendication d'un droit au bonheur. La Révolution française permet l'émergence d'une nouvelle conception du bonheur. D'un bonheur hypothétique, parce que conditionné par les actions réalisées par l'homme durant son existence, et hors de portée de l'homme, parce qu'appartenant à la vie céleste, la Révolution française permet de passer à une nouvelle conception du bonheur si différente de son acception traditionnelle qu'elle donne le sentiment d'avoir créé l'idée même de bonheur. [...]
[...] Le citoyen obtient passivement des droits. Elle fait référence à la liberté des modernes comme simple jouissance de ses prérogatives privées par opposition à la liberté des anciens, liberté d'action et de participation au pouvoir tel que les a décrites Benjamin Constant. Enfin, la revendication d'un droit au bonheur conduit à nier le risque pour garantir le bonheur. La constitutionnalisation du principe de précaution répond à une attente collective qui réclame avant toute chose la garantie du bonheur. Le principe de précaution issu de la philosophie de Jurgen Habermas et de son ouvrage Le principe responsabilité pose le principe d'une action sous- tendue par une éthique de la peur. [...]
[...] Elle suppose d'accepter d'une part de reconnaître à l'Etat la capacité de mener à bien une action collective et d'autre part de concevoir de nouveau le bonheur comme un projet collectif. Si l'idée de bonheur a été pendant très longtemps cantonnée à un « après » et à un « au-delà », la Révolution française a rendu réelle l'attente d'un bonheur « maintenant » et « ici ». Si le bonheur a d'abord été pensé de façon collective, le 20e siècle marqué par l'échec du communisme et les guerres en chaîne ont fait renoncer à la réalisation d'un bonheur commun. [...]
[...] La Révolution française et ses utopies Jusqu'à la fin du 18e siècle, la société est structurée par la religion qui organise les rapports sociaux et innerve tous les pans de la vie humaine. La société ne connaît pas de séparations. L'économie, la politique, l'humain sont perçus à travers le prisme du religieux qui supplante toutes les composantes de la société et confère à la société une dimension unitaire. Dans ce contexte, le bonheur n'apparaît pas comme une perspective réalisable dans la vie terrestre. Le bonheur ici et maintenant est une idée que nie la religion chrétienne. [...]
[...] La production plus massive et à moindre coût permet d'offrir à chacun des conditions d'existence meilleures. L'émancipation politique opérée par la révolution et l'accès à une vie matérielle moins rigoureuse permet aux individus de penser l'avenir comme le lieu de la réalisation d'un bonheur collectif. Cette espérance est sous-tendue par l'idéologie du progrès qui accompagne le mouvement révolutionnaire et qui fait de chaque jour une marche tendue vers le meilleur. L'espérance d'un bonheur collectif est alors au cœur de la réflexion intellectuelle. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture