A première vue il est difficile, voire même impossible de ne pas être soi-même. Je ne peux à l'évidence être en même temps moi-même et différent de moi-même. L'apparition du ''je'' chez l'enfant est d'ailleurs le signe qu'il commence à s'identifier c'est-à-dire qu'il ne se confond pas avec les autres. ''C'est à moi'', ''moi tout seul", autant de manières de dire que ''moi ce n'est pas toi'', "moi, c'est moi''.
Pourtant nous savons aussi qu'à cause des autres nous pouvons ne pas être tout à fait nous-mêmes. La présence des autres introduit une distance entre ''moi et moi", entre le moi qui vit spontanément et le moi qui est vu, jugé, influencé par les autres. Nous sommes ''en représentation". Se pose alors le problème de l'authenticité : peut-on être véritablement soi-même et doit-on chercher à l'être ? (...)
[...] A la limite, être soi-même exigerait la solitude. Mais la défense de la pureté et de l'authenticité de la personnalité peut apparaître comme idéale voire infantile. Ce serait croire que chacun aurait une identité originelle, spontanée et isolable. Ce serait postuler une connaissance et une maîtrise de soi que nous sommes loin de posséder. En effet, nous pouvons nous tromper nous-mêmes, nous mentir à nous-mêmes par mauvaise foi. De plus, sans parler des substances (alcool, drogue) qui peuvent altérer nos capacités, nous ne sommes pas toujours maîtres de nos actes lorsque nous nous livrons à nos passions par exemple, car les passions sont à la fois voulues et subies. [...]
[...] Il n'y a pas de sans L'autre nous oblige à nous identifier. Il n'y a pas de sans ''l'autre'' mais il y a aussi de l'autre en moi. En effet, parce que nous vivons en société, il s'agit d'être quelqu'un pour les autres qui parlent de nous de l'extérieur comme d'un personnage social (c'est tel'' qui est prof, marié . Ne pas être soi-même dans ce contexte peut donc signifier pas être sincère et spontanées”. Rousseau valorisera ainsi l'amour de soi au détriment de l'amour-propre qui n'est que le souci de l'image de soi face aux autres. [...]
[...] Si l'inconscient provient bien d'un conflit entre soi et soi, il a ce caractère de ne pouvoir être résorbé que par l'individu lui-même, par le travail sur soi qu'est la cure psychanalytique; On le voit, même s'il y a de l'autre en nous, même si de nombreux obstacles nous empêchent d'être nous-mêmes, nous ne sommes pas aliénés au même titre que des robots. La question de la connaissance et de la maîtrise de soi se pose toujours . Etre soi-même est loin d'aller de soi. Cela réclame un effort. [...]
[...] C'est ce qui accompagne toutes les représentations. A première vue, l'on ne peut donc pas ne pas être soi-même, le ''soi-même'' désignant ici non pas tant le fait de rester identique à soi-même (ce serait être figé, être comme une chose inanimée) que de revendiquer à la première personne tous nos actes et représentations. J'ai changé mais c'est encore moi. Cette adéquation de soi à soi, Descartes l'a affirmée de manière exemplaire dans l'intuition du cogito : au moment où je pense, je sais immédiatement qu'un sujet en moi pense et existe. [...]
[...] Si la question paraît tout d'abord saugrenue - s'il y a quelqu'un de bien placé pour être lui-même, c'est bien moi, ce n'est pas l'autre la capacité à n'être pas soi- même se révèle dans le rapport inauthentique à soi et aux autres. La question se pose bien aussi sur le plan moral : si nous n'avons pas toujours la connaissance et la maîtrise de nous-mêmes, cela n'indique pas que nous n'ayons pas à travailler à les acquérir. Au contraire, sagesse et bonheur exigent que nous soyions nous-mêmes. C'est du moins le point de vue de la sagesse spinoziste par exemple. [...]
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