Etre anti-moderne. Etre « anti », c'est-à-dire, si l'on suit à la lettre la définition du dictionnaire Robert : « être en face de, être contre, être à l'opposé de ». Il s'agit donc d'être contre la modernité comme on peut être contre la nouvelle constitution européenne, contre le rétablissement de l'uniforme à l'école, contre l'avortement, contre la chasse à courre, contre le PACS, contre les OGM. Etre anti-moderne apparaît comme une opinion parmi la multitude d'opinions que nous pouvons avoir. Etre anti-moderne est une position, une conviction tout au plus. L'on conçoit la modernité comme un camp et l'on se doit de choisir son côté, être pro ou anti. Serait moderne ce qui rompt avec la tradition et serait traditionnel ce qui résiste à la modernisation. Selon si l'on est pour ou contre la modernité, l'on percevra cette dernière comme une valeur et un but que l'on doit poursuivre à tout prix, ou comme l'expression même de la décadence. Le sujet m'impose donc à réfléchir à ces évaluations contradictoires qui s'expriment dans le monde de l'art plus que nulle part ailleurs ; car comme nous le verrons au cours de cet exposé, l'art est un « champ de bataille » propice à accueillir cette querelle entre modernes et anti-modernes, et c'est sous cet angle qu'il me semble le plus intéressant de traiter la question. Mais attention, le terme sur lequel porte l'interrogation est « peut-on », nous ne cherchons pas à découvrir s'il est bien où non d'être anti-moderne, mais tout simplement si cela est possible. La question nous oblige à réfléchir sur la validité de l'anti-modernité. En apparence, il s'agit de savoir s'il est possible de vivre en allant contre son temps en supposant que la modernité est inéluctable, mais peut être il y a-t-il un enjeu plus profond. En effet, la modernité n'a-t-elle pas elle aussi des limites, auquel cas, nous pouvons également nous poser la question, qui fait référence à Rimbaud, peut-on « être absolument moderne » ? C'est-à-dire, est-il véritablement possible de choisir entre la modernité et l'anti-modernité ? N'est-ce pas une utopie que de penser avoir le choix ? N'y a t-il pas quelque chose de plus fort à savoir le mouvement irrépressible de l'histoire qui nous dépasse quelque soit notre opinion ? C'est dans cette optique et en suivant ce raisonnement que nous tenterons de développer cet exposé. Ainsi, dans une première partie, j'essayerai de mettre en avant les raisons qui peuvent pousser à être anti-moderne et les problèmes que cela posent ; par la suite, nous verrons que la modernité à ces limites, et que si l'anti-modernité semble être en contradiction avec le temps présent, la modernité peut sembler tout aussi relative et fragile. Enfin, nous tenterons de sortir de cette opposition classique, et de développer l'idée qu'être moderne ou anti-moderne se rejoignent enfin en étant toutes deux des positions impossibles.
[...] Ces toiles étaient le témoignage d'une époque décadente. La modernité fut souvent associée à cette idée, Nietzsche, lui-même s'en prenait à elle en ces termes. Face à ce déballage obscène, la tradition se donne comme un gage de sérieux, et il faut reconnaître aux anti-modernes une connaissance assez conséquente de l'histoire de l'art pour pouvoir juger la modernité. Les toiles dont je viens de parler ne sont qu'un exemple parmi d'autres, les traditionalistes de chaque époque ont pensé qu'on ne pourrait pas tomber plus bas dans la dégradation de l'art. [...]
[...] Peut-on être anti-moderne ? Etre anti-moderne. Etre anti c'est-à-dire, si l'on suit à la lettre la définition du dictionnaire Robert : être en face de, être contre, être à l'opposé de Il s'agit donc d'être contre la modernité comme on peut être contre la nouvelle constitution européenne, contre le rétablissement de l'uniforme à l'école, contre l'avortement, contre la chasse à courre, contre le PACS, contre les OGM. Etre anti-moderne apparaît comme une opinion parmi la multitude d'opinions que nous pouvons avoir. [...]
[...] C'est ce que je voudrais développer dans cette première sous- partie. A. Une tradition moderne Comme nous le disions à l'instant, le mot d'ordre moderne est de faire nouveau à tout prix. Dès les premières pages de son livre, Antoine Compagnon met en avant cette volonté de rupture acharnée : chaque génération rompant avec le passé, la rupture même constituerait la tradition, une tradition de la négation avec le nouveau comme valeur. Pire encore, alors que les modernes prétendent bouleverser les règles établies et aspirent à une certaine liberté, ils ne font en réalité qu'en créer de nouvelles. [...]
[...] Les anti-modernes et l'art Choisir d'être anti-moderne, c'est un peu brandir un rempart contre le changement. En art, comme le définit Meschonnic dans son ouvrage Modernité, modernité, le classique évoque le respect des règles établies et le moderne en est l'infraction. Le moderne n'est que surprise, le classique est ce qui ne surprend pas. Le moderne malmène les Institutions, qu'il s'agisse du Salon ou étaient présentées les œuvres officielles pour les peintres du 19éme où de L'Académie française pour les écrivains, le moderne choque. [...]
[...] Et s'il est vain d'être anti-moderne comme il est vain d'être moderne, que faut-il viser ? C'est en essayant de trouver des réponses que nous achèverons cet exposé Modernité et anti-modernité, un rapport particulier au temps Introduction. Au cours de ces deux premières parties, nous avons souvent associé la modernité à un destin, à un mouvement de l'histoire en cours d'accomplissement, qui se déroule inévitablement, presque comme une fatalité, que l'on se déclare moderne ou anti-moderne. Si la modernité est relative et si nous sommes tous un jour anti-modernes, l'opposition tradition et modernité n'est plus valide. [...]
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