Pourquoi l'homme peut-il donc parfois désirer l'inconscience ? Faut-il voir dans ce désir une faiblesse psychologique ou un besoin naturel ? En quel sens est-ce une caractéristique humaine ? Cette question implique aussi de vérifier si c'est exactement l'inconscience qui est désirée ou si ce n'est pas autre chose qui est en jeu au travers de l'inconscience.
[...] Le guide l'avait vu mettre sciemment le pied dans le vide. Son désir de se " dépasser " était très ambigu, ce désir de pousser les risques jusqu'à l'inconscience était habité par une pulsion morbide qu'il cherchait à accomplir. En terme de psychanalyse, on dirait que l'homme avait refoulé en lui un conflit qui faisait qu'il se détestait intérieurement. Ce refoulement dans l'inconscient engendre de lui- même des actes manqués : ce besoin compulsif de danger. Il peut donc y avoir plusieurs types de motivations du désir d'inconscience : celui d'une fuite psychologique devant la réalité, celui qui consiste à essayer de combler un vide de sens, celui d'un désir de mort ou d'une réclusion dans un plaisir solitaire, d'un besoin de se faire reconnaître devant autrui. [...]
[...] Derrière le désir d'inconscience peut se profiler un désir de mort. Le langage de la drogue est terriblement éloquent. On cherche à " s'éclater à se " défoncer mais ces mots veulent dire se détruire, éclater dans une extase finale . Le plaisir devient alors l'alibi qui accompagne une motivation cachée, celle de mettre fin à ce que l'on est. En un sens, le plaisir tiré de l'alcool, du jeu, tous les plaisirs sensuels poussés dans l'excès peuvent relever de cet étrange désir. [...]
[...] Le désir d'inconscience est à l'opposé de nos aspirations. En nous même, il y a deux tendances, rationnelle et désirante et on l'est heureux quand la première a prise sur l'autre. Que l'on puisse aspirer à l'inconscience tout de même atteste seulement du fait que l'homme est un être faible et fragile. La vie nous oblige à vouloir le meilleur, à désirer une conscience plus élevée en toutes choses. [...]
[...] L'aveuglement typique de l'inconscience va ici avec l'étourdissement que l'on se donne à " s'amuser " avec d'autres. Il y a ainsi des choses que l'on ne ferait pas tout seul, mais que par entraînement on fera dans la gaieté collective : par pure inconscience. Cela veut dire qu'il n'y a pas exactement de mauvaises intentions, sinon ce ne serait plus de l'inconscience, mais une sorte de fuite en avant dans une impulsion. On est à un moment comme aveuglé, on agit de manière écervelée, on ne se rend pas compte de ce que l'on fait. [...]
[...] Dans la théorie freudienne, le refoulement est interprété comme la lutte entre Eros (la force de la vie) et Thanatos (la pulsion de mort). Il y a une manière de prendre des risques inconsidérés, de flirter avec la mort qui relève directement de cette attitude. Jung, dans Essais d'exploration de l'inconscient mentionne le cas d'un fanatique de l'alpinisme qui voulait toujours se " dépasser " disait- il. Il avait été mêlé à une affaire très malsaine qui le torturait et dont il ne savait pas comment sortir. Ses rêves le montrèrent faisant une chute mortelle. [...]
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