« Chaque homme est une humanité, une histoire universelle. » écrit Jules Michelet dans son Histoire de France, en 1873. C'est donc que pour l'écrivain, l'histoire de l'humanité se fond de fait à celle de l'homme. L'histoire, ce récit d'événements relatifs à une époque, à une nation, à une branche de l'esprit humain, devient alors un passé commun, une kyrielle de faits, de gestes, dont chaque individu aurait un souvenir identique. C'est une histoire universelle, l'histoire de tous les hommes.
Mais voilà que près de deux siècles plus tard, la question nous est de nouveau posée : peut-on comparer l'histoire de l'humanité à l'histoire de l'homme ? Ces deux concepts sont-ils analogues, équivalents ? Ces interrogations sont légitimes, ne serait-ce que par le flou qui entoure les définitions des deux concepts ; l'homme est un être humain, tandis que l'humanité est le genre humain.
[...] Ainsi, si histoire de l'humanité et histoire de l'homme sont similaires, en quoi le sont-elles ? Et si elles étaient finalement deux entités bien à part, deux histoires bien distinctes ? Histoire de l'humanité et histoire de l'homme sont liées ne serait-ce que parce que l'on ne peut dissocier l'une de l'autre. Ainsi l'humanité existerait-elle en dehors des hommes qui la composent ? Et comment appeler la somme de tous les êtres humains, sinon l'humanité ? Car si l'on considère l'humanité comme une entité homogène, la somme des individus qui composent le genre humain, alors il devient possible d'établir une comparaison, une analogie même, entre la dimension évolutive de l'humanité et celle de l'homme. [...]
[...] Car il faut remarquer que l'idée moderne d'un développement mondial impliquant à la fois que tous les hommes participent à l'histoire humaine et aspirent globalement aux mêmes choses semble en effet être devenue vraie à la faveur de la mondialisation opérée au XXème siècle et de la suprématie de la civilisation occidentale. Mais il n'est que trop facile que de tomber dans le piège de prendre sa propre société comme référence absolue. L'histoire est le théâtre sur lequel chaque peuple intervient à son tour pour apporter, selon la nature propre de son esprit et de son passé, sa contribution particulière à l'odyssée de l'humanité. Mais une meilleure compréhension de notre histoire permet-elle forcément d'y donner un sens ? [...]
[...] En ce sens, Hegel rejoint donc la théorie selon laquelle histoire de l'humanité et histoire de l'homme se confondent bel et bien. Mais peut-on aller jusqu'à dire que les deux concepts sont synonymes ? Il serait naïf, sinon erroné de le croire. L'on peut trouver toutes sortes de corrélations qui lieraient à juste titre l'histoire de l'humanité à l'histoire de l'homme, faire apparaître la dépendance étroite qui unit l'un à l'autre, mais on ne peut pas affirmer que humanité égale homme Comment soutenir que la dimension historique à l'échelon de l'humanité est analogue à la dimension évolutive à l'échelon d'un individu ? [...]
[...] Il est évident que l'histoire des hommes a écrit l'histoire de notre humanité, au moins autant que l'histoire de l'humanité a orienté, guidé celle de ses hommes. Mais si les hommes et l'humanité ont un patrimoine commun, ils ont aussi une même essence. Ainsi une fusion de tous pourrait être imaginée au profit d'un seul, la somme de tous les êtres devenant alors un organisme entier, un être collectif l'humanité, qui pourrait de ce fait être comparée à un individu. [...]
[...] Ainsi de 1562 à 1590, tandis que la France des catholiques et des protestants se déchire sous l'œil indifférent de Charles IX, à quelques milliers de kilomètres de là, en Amérique Latine, l'empire Incas s'effrite et s'écroule, c'est toute une civilisation qui est engloutie Si l'on avait demandé à un Français et à un Inca de cette même époque de nous raconter leur histoire, y aurait-il eu ne serait-ce qu'une phrase en commun ? Et si l'on avait demandé à nos deux hommes de nous raconter l'histoire de l'humanité ? [...]
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