Peut-on avoir peur de la liberté ? Une question philosophique provocante… Au premier abord, et quelle qu'ait été notre éducation, nous sommes tous tentés de répondre « non, bien sûr ». Tiendrions-nous une des grasses évidences communes, si appétissantes aux philosophes ? C'est bien possible. Essayons de comprendre rapidement, avant de nous attaquer au problème, quels sont les ressorts et mécanismes qui ont projeté, avant toute réflexion, ce « non, bien sûr ». Il ne sera ensuite que plus facile de cerner les présupposés qui courent autour de la liberté.
« Avoir peur » peut se rapprocher ici d' « éviter », « être impressionné au point de fuir ». Or la Liberté est un concept à connotation très positive, ce nom résonne en nous comme une chance, un but, « qui chante plus qu'il ne parle » disait Paul Valéry. Voilà ce qui choque dans la question: on ne cherche pas à éviter ce que l'on poursuit, ce que l'on considère comme idéal de l'existence. Pourquoi idéal? Plus que la démocratie, le respect ou la non-violence, « Liberté » n'a cessé d'apparaître sur nos cahiers d'écoliers, de résonner dans les salles de classes, dans les poèmes. Nos plus grands intellectuels nous l'ont défendue avec passion, et nous avons suivi. Trop passivement peut-être pour remarquer que la liberté faisait l'objet de tant de louanges et d'apologues parce qu'elle n'était pas si évidente, si désirable à première vue, et qu'elle n'était pas le Saint Graal de tous… Il va donc nous falloir écailler l'image positive dans un premier temps, afin de découvrir ce qui peut effrayer dans la liberté.
[...] Par respect pour nos semblables, nous avons un devoir de Liberté. D'un point de vue purement évolutif, (encore une fois!), montrons que la liberté est nécessaire. Imaginons une société humaine semblable à une fourmilière, où tous seraient asservis à la volonté d'un seul et lui obéiraient aveuglément. Tant que ce chef suprême guide intelligemment la société, cette dernière serait certainement plus efficace que tout autre car débarrassée de la perte de temps (au niveau rentabilité) que constituent les débats, les contestations, les oppositions, les réflexions, etc. [...]
[...] Alors je me rendrais coupable non seulement d'avoir renoncé à ma liberté, mais en plus d'avoir mal agi. Ici apparaît la superficialité de ceux qui préfèrent fuir la responsabilité en laissant leur liberté à un autre : ils seront doublement responsables. Si l'autre les a bien guidés, il recevra pour lui tous les honneurs d'avoir pris le risque de se tromper. Mais s'il pousse ceux qui le suivent aveuglément au Mal, alors sur lui, mais surtout sur eux, reposera la responsabilité d'avoir mal agi (et de s'être laissés guider). [...]
[...] Pour finir, la liberté semble absolument nécessaire à la condition humaine. Que pourrions-nous répondre à un observateur extérieur et scientifique qui nous affirmerait que l'homme n'est rien de plus qu'un animal évolué ? Que ce dernier, par sa conscience, par sa raison, a acquis la possibilité de guider ses actions selon des lois autres que celles de la pure nécessité, de l'instinct et des pulsions (à moins que l'on ne soit en face d'un adepte de Nietzsche que l'Homme est différent parce qu'il peut choisir la différence, qu'il n'est plus prisonnier d'un code génétique ou des décision de la meute. [...]
[...] Et pourtant, à peine cinq pages plus haut, la plupart d'entre nous étaient convaincus que la liberté ne leur faisait ni peur, ni problème, et qu'elle leur était définitivement acquise dans notre société démocratique. Un devoir de vigilance de chacun n'est-il donc pas des plus urgents ? Bibliographie Qu'est ce que les Lumières d'Emmanuel Kant Notions de philosophie, Sous la direction de Denis Kambouchner, collection Folio Essais, "Le genre humain", "Ethique et morale". [...]
[...] Ces activités, nécessaires à un choix judicieux, sont fatigantes pour l'esprit, parfois même pénibles. Qui n'a pas un jour baissé les bras face à un choix trop difficile, se ruant au hasard sur une solution qui pouvait être la mauvaise ? Se laisser mener par un guide spirituel, par la masse, ou plus simplement par ses préjugés, s'impose alors souvent à l'homme peut vigilant. C'est donc dans la peur que s'assume notre liberté de choix, et ce qui se fait dans la peur n'est pas un plaisir. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture