Perception du sauvage, rapport au sauvage, mode de vie rudimentaire, société humaine, besoins primaires, homme primitif, Jean-Jacques Rousseau, infériorité technologique, Lewis Morgan, anthropologie évolutionniste, homme occidental, ethnocentrisme
La vision du sauvage, et plus précisément de l'homme sauvage, renvoie à plusieurs réalités. Il incarne à la fois la figure imaginée et mythifiée d'un homme vivant dans la nature et rapprochant son comportement de celui de l'animal. Il subsiste à l'aide d'un mode de vie rudimentaire et n'écoute que ses besoins primaires et fondamentaux (se nourrir, dormir et se reproduire). Il est en quelque sorte l'homme des premiers temps. Mais le sauvage incarne aussi le versant de l'homme civilisé et cultivé. Dénué de langage et de morale, car plus proche de l'animal et de la nature que de l'homme et la société, il reste à un stade primaire, primitif. Il n'est donc tout simplement pas un être assez évolué, aussi bien culturellement que techniquement.
[...] En effet, on ne voit et on ne comprend ce qu'est le sauvage seulement à partir du point de vue occidental, avec cette culture précise. Par cette distinction, cette appellation, l'Européen permet avant tout de se différencier. Ainsi l'état sauvage représente aux yeux de l'Européen l'état dans lequel il aurait pu demeurer s'il s'était laissé conduire par sa nature humaine primitive. On range les sociétés humaines dans des catégories ce qui facilite notre appréhension du monde tout en nous éloignant de sa réalité. [...]
[...] De là, le sauvage s'impose comme le stade premier de tout être civilisé, et se distingue par son infériorité technique, technologique et économique. Ici se pose la marque entre natures et la culture : l'on a d'un côté l'homme civilisé, capable de penser, de faire preuve d'abstraction, et d'avoir recours à un langage, et de l'autre l'homme sauvage, gouverné par ses besoins primaires, incapable d'établir un langage et de penser abstraitement. Pour se sortir de cette condition animale, le sauvage a pour seule finalité celle d'arriver aux modes de pensée et de vie similaires aux civilisés. [...]
[...] Avec ces bornes, on a pu distinguer quels peuples sortes de ces cadres et lesquels en étaient conformes. Avec l'institution de ces bornes, on a donc pu leur donner ou non le statut d'homme évolué et civilisé. Pour reprendre les propos de Duchet et l'explication qu'elle fait des propos de Rousseau, il est plus aisé de faire de tel homme une exception dans la nature, que de repenser les systèmes entiers qui le gouvernent, ou que de discerner les variétés et diversités au sein de l'humain. [...]
[...] C'est notamment ce que projette Rousseau dans le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes. Il y suppose un état de nature où les hommes vivraient isolés, un état antérieur à toute société humaine et rudimentaire, à l'instar des peuples d'Indiens d'Amérique et des comptes rendus qu'on put en faire les explorateurs. On peut penser à une nécessité pour les philosophes des Lumières de retracer et de retrouver les fondements de l'homme, ce qu'il a pu être, « sortant des mains de la nature », comme le disait Rousseau. [...]
[...] Enfin le dernier stade, celui où tous les hommes doivent converger, le stade de la civilisation, largement fondé sur l'image de l'homme européen dont on pense qu'il est technologiquement et techniquement le plus évolué. Par cette vision binaire, où il y aurait d'un côté l'homme civilisé et donc pleinement évolué, et d'un autre l'homme sauvage et donc encore en retard sur son temps, on projette une seule ligne évolutive de l'être humain. Une ligne évolutive qui concourrait vers une seule finalité : atteindre le niveau de l'homme blanc, occidental, celui dont les prouesses techniques, morales et économiques sont les plus avancées. [...]
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