Au premier abord, il semble que la pensée ne naisse pas de l'action mais bien au contraire de l'inaction. Plus d'un philosophe affirme, en effet, qu'il faut se détourner de l'action pour philosopher, et que penser est l'inverse d'agir. Nul n'affirme cette idée avec plus de force que Platon. Selon lui, toute action est un affaiblissement de la pensée. La découverte du vrai exige une véritable conversion: se détacher des apparences d'ici-bas et contempler les Idées.
Pourtant, la pensée de Platon est imprégnée de considérations politiques. En témoigne, La République et Les Lois, deux de ses plus grandes œuvres. C'est à partir de sa propre expérience politique que Platon est amené à louer la vraie philosophie et à affirmer que, à sa lumière seule, on peut reconnaître où est la justice dans la vie publique et dans la vie privée. Et c'est aussi parce que le bonheur collectif lui paraît encore possible qu'il réfléchit aux problèmes de l'organisation de la Cité et des libertés civiques. On le voit, la pensée de Platon ne naît pas dans un ciel intelligible mais s'enracine dans la pratique politique de son temps.
La pensée naît-elle de l'action ou de l'inaction?
[...] Quand je pense, je n'agis pas. Ainsi, la vraie foi exige le renoncement à la vie active. Seule une vie retirée, loin de toute agitation, peut contribuer à l'élévation spirituelle. La vie monastique est une vie de prières et de méditations. La pensée pure, la vraie pensée, c'est l'inaction. Mais la prière du moine n'est-elle pas agissante? N'a-t-elle pas des effets sur les autres hommes qui travaillent? Cette prière est donc un moment de l'action. La pensée naît de l'action et doit retourner à l'action. [...]
[...] Non seulement la pensée naît de l'action, mais elle est, elle-même, action. La pensée n'est, en effet, rien d'autre qu'un moment de J'action, La pensée coupée de l'action devient rêve ou utopie et ne mérite plus le nom de pensée. Seule est digne d'être appelée pensée, l'action. La foi qui n'engage pas la vie, qui n'agit pas, n'est pas sincère. Le marxisme n'est pas seulement une théorie, une philosophie, une idéologie, c'est aussi une manière de vivre. Les philosophes, dit Marx, n'ont fait qu'interpréter le monde de différentes manières, il faut le transformer.» Une pensée se vit. [...]
[...] Mais cette pensée scientifique une fois engendrée est retournée à l'action sous la forme d'applications pratiques nouvelles qui, à leur tour, ont permis de nouveaux progrès de la pensée. La pensée naît donc de l'action et doit y retourner sous peine de tomber en désuétude. Chez l'enfant, il y a évolution de l'acte à la pensée. L'action est première, mais la véritable base du développement de l'enfant est la pensée. Très tôt, la pensée accompagne l'action et joue un rôle déterminant. La pensée naît donc de l'action et retourne à l'action. [...]
[...] c'est-à- dire en se détournant du vécu, de l'expérience immédiate, de l'action. La science naît donc de la pensée et ne doit rien à J'action. L'enfant en bas âge n'agit pas, mais est agi. L'action présuppose la conscience des actes. Or celle-ci n'émerge qu'avec Je développement de la pensée. Vers trois ans, l'enfant, volontairement, c'est-à-dire par une impulsion qui ne vient que de lui refuse de suivre les indications de ses parents. Cette volonté ou volonté négative est un moment capital de l'affirmation de soi. [...]
[...] C'est pourquoi, comme l'affirme Aristote dans Métaphysique, les mathématiques sont apparues en premier lieu en Égypte, où la caste des prêtres disposait du loisir. De même, on constate que dans la société grecque antique. Il y a ceux qui agissent et ceux qui pensent parce qu'ils en ont le loisir. D'un côté, les esclaves, de l'autre les maîtres d'esclaves. L'esclavage, dit Marx, est le terrain sur lequel ont poussé les premières fleurs de la civilisation C'est à l'esclavage, en effet, qu'on doit la pensée grecque. La pensée naît donc de l'inaction. [...]
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