Du latin passio, de pati, supporter, souffrir, la passion est un terme équivoque en raison de son évolution sémantique. Chez les Grecs (Aristote, les Stoïciens), il est lié à l'idée de subir une action ou une affection, à la passivité. Chez Descartes, les passions ne sont pas distinguées des émotions, des états affectifs, des excitations subies par l'âme sans le secours de la volonté.
Dès lors, le bonheur qui est un état de bien-être physique et psychologique parfait, dans lequel on ne ressent aucun manque ni trouble, mais plutôt une totale satisfaction de nos besoins et désirs ne peut découler de la passion. Est-ce là le bonheur pour l'homme, de n'obéir que par raison ? Peut-on atteindre le bonheur en étant frustré par des désirs irréalisables ? Ou bien, la passion est-elle réellement un obstacle au bonheur, en ce sens qu'elle va à l'encontre de la stabilité que nécessite le bonheur ?
[...] C'est donc un personnage très ambivalent, qui ne peut apporter la sérénité. Chez Aristote, et tous les philosophes scolastiques qui vont suivre sa doctrine jusqu'au XVIème siècle, la passion est assimilée au c'est-à-dire au malheur, à la maladie du corps et de l'âme. Descartes dans le paragraphe premier du Traité Des Passions l'explique clairement “Tout ce qui se fait ou qui arrive de nouveau est généralement appelé par les philosophes (scolastiques) une passion au regard de celui qui fait qu'il arrive”. [...]
[...] Si la passion ne permet pas d'atteindre le bonheur, par quels autres moyens peut-on y parvenir ? Lorsque l'on parle de bonheur, la définition reste multiple : un état de sérénité, de quiétude sans plaisirs, la réalisation de tous ses désirs pour éviter toutes frustrations. Cependant, le bonheur est-il une valeur sûre ? Est-il réellement nécessaire de l'atteindre ? Si oui, par quels moyens ? Si non quelle est l'utilité de la passion ? Pour les épicuriens, le bonheur consiste à “vivre conformément à la nature”, pour parvenir à l'aponie - l'absence de douleur du corps - et l'ataraxie - l'absence de trouble de l'âme. [...]
[...] Les désirs naturels sont nécessaires au bonheur. Il y a là distinction entre volonté et nature : pour les épicuriens, la volonté ne joue pas de rôle dans le tri des désirs et des passions, seule la nature permet de guider les hommes. Cependant, pour les épicuriens, aucun bonheur n'est égal à celui de philosopher. Grâce à la philosophie, l'individu apprend à posséder la capacité à vivre dans le présent, sans crainte de l'avenir, sans le regret du passé mais dans le souvenir heureux du passé et dans l'anticipation sereine de l'avenir. [...]
[...] Pour ces auteurs de l'Antiquité, la clé de voute est le souverain bien, c'est-à-dire sur l'accord entre la raison et l'ordre du monde. Cependant n'est-il pas trop excessif de considérer la passion uniquement comme un mal ? La passion qui découle en partie des désirs n'est-elle pas un moyen de parvenir au bonheur, en ce sens qu'elle évite aux hommes de vivre dans le malheur ? Supprimer toutes les passions n'en reviendrait-il pas à nier ses propres envies, désirs et donc à se nier soi-même ? [...]
[...] Cependant, l'utilisation de ses passions pour parvenir au bonheur doit être prudente et réfléchie si l'on ne veut pas tomber dans l'excès et aller à l'encontre du but recherché. Il est facile de s'éloigner du bonheur, en tant que satisfaction et quiétude de l'individu, par la réalisation des passions ou non. Cependant, si le bonheur est si difficile à atteindre, quelles en sont les raisons ? Pourquoi peut-il à la fois être dépendant et indépendant de la passion ? Peut-on réellement atteindre le bonheur ? [...]
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