Dissertation de Littérature ayant pour sujet : "Peut-on reprocher à une oeuvre d'être immorale ?".
[...] Puisque l'œuvre est représentation ou fiction, le jugement moral excède son domaine en la visant. Mais le beau, comme l'a souligné Kant, peut être symbole de la moralité Le symbole désigne la ressemblance parfaite entre deux relations, et non le rapport entre représentation et réalité : l'œuvre est unification du divers, par sa finalité intrinsèque (qui appartient à l'objet lui-même), indépendamment des facteurs extérieurs -qui seraient, eux, extrinsèque à l'œuvre- comme l'est la moralité (où la loi unifie les intérêts égoïstes en les dépassant). [...]
[...] Peut-on reprocher à une œuvre d'art d'être immorale ? Analyse : -le reproche a existé et existe, peut-on désigne donc, non la possibilité du reproche, mais sa légitimé. -Si l'on reproche à une œuvre d'être immorale, c'est qu'on attend en un sens de toute œuvre qu'elle soit morale, sinon moralisatrice. -Est-il acceptable de confondre le jugement esthétique concernant l'œuvre d'art avec un jugement moral ? Ce dernier concerne des actes ou des conduites réelles, alors que l'œuvre est représentation ou appel à l'imaginaire ; le jugement moral met en avant le contenu, ce qui méconnaît l'aspect formel des œuvres. [...]
[...] La démarche qui consiste à se pencher sur chaque partie du tout ne peut être efficace en ce qui concerne l'art. C'est la corrélation entre les effets plastiques et le contenu de l'œuvre qui donnent toute son essence et sa beauté à une œuvre d'art. Finalement, ceux qui font, trop fréquemment le reproche d'immoralité à une œuvre d'art adoptent en fait un mauvais point de vue. Ne se portant que sur le contenu de cette dernière, il ne peuvent en avoir la juste interprétation. [...]
[...] De même, le pouvoir stalinien met fin aux recherches des avants-gardes antérieures parce que leurs œuvres seraient incompréhensibles pour le peuple Il s'avère en fait que toute censure ne considère que le contenu, et privilégie un art moralisateur l'écueil commis est alors de ne considérer en aucun point la plasticité de l'œuvre. Ce qui offusque le point de vue moral, c'est le contenu apparent des œuvres. Accuser Madame Bovary d'immoralité, c'est n'en considérer que l'histoire, sans tenir compte du travail d'écriture par lequel la littérature existe. A ce compte, il faudrait aussi interdire la publication, par la presse, de tous les faits d'hivers crapuleux ou horribles. Complémentairement, l'interdiction s'accompagne de l'obligation de proposer des contenus moralisateurs. Tout contrôle prétendant supprimer certaines œuvres en recommande forcément d'autres en raison de leur enseignement. [...]
[...] Le reproche d'immoralité est traditionnel, et produit de multiples censures. Il trouve son fondement chez Platon. Pour ce dernier, les poètes ne peuvent être reçus dans la cité «idéale» : en raison de leur délire, ils risquent de dire n'importe quoi, y compris des choses fausses et moralement inacceptables. Parallèlement, la peinture, n'étant que «copie de copie» puisque ses modèles sont sensibles, manque de fondement ontologique : elle est, comme la poésie, source possible d' «anarchie» (au double sens politique et ontologique : étude de l'être en tant qu'être ; être en soi) Ce reproche est récurrent et se retrouve sous forme d'interdictions. [...]
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