L'oeuvre d'art bénéficie en général d'un tel halo de respectabilité que l'on peut hésiter à la considérer comme résultant aussi d'un travail. Pourtant, ce que l'on y admire ne peut être produit sans effort, et nombreux sont d'ailleurs les artistes qui, pour lutter contre ce que les théories de "l'inspiration" semblent suggérer de facilité ou de "don du ciel", soulignent les difficultés de leur activité.
Il n'en reste pas moins que l'unicité (même relative) de l'œuvre s'oppose à la production en série, et que, si cette dernière est destinée à la consommation, l'œuvre semble bénéficier d'une indifférence au temps. Cela suffit-il pour ignorer le travail spécifique dont elle est l'achèvement?
[...] Il suffit de voir des manuscrits de Flaubert ou de Proust pour comprendre aussitôt que l'écriture n'a rien d'un amusement. Valéry disait plaisamment qu'en poésie, le premier vers est de l'inspiration, mais les suivants sont de la transpiration. Transformer le matériau exige des efforts, sans doute peu physiques dans le cas de l'écriture, mais qui confirment l'éventuelle pénibilité du travail artistique. Les objections restent nombreuses: l'art est peut-être un travail, mais ses conditions ne sont quand même pas comparables à celles d'un ouvrier à la chaîne. [...]
[...] Mais une œuvre dégradée est conservée, alors qu'un produit dégradé n'est plus bon à rien. Il est utile de souligner l'existence d'un authentique travail dans l'art, ne serait-ce que pour dénoncer les mythologies de l'artiste doué insouciant ou loin du monde, et ce, même si ce travail est très particulier puisque, tout en concernant un matériau, il y importe un aspect spirituel qui fait défaut à la production du travail ordinaire. Quant à l'œuvre, elle s'écarte du produit, non seulement parce qu'elle n'est pas destinée à la consommation, mais surtout parce qu'elle est durablement porteuse d'un sens ouvert aux interprétations. [...]
[...] Et la poésie (poiêsis) est d'abord en relation avec poiein(« faire, produire L'anonymat des plus anciennes œuvres grecques confirme l'appartenance première de ce que nous nommons œuvres d'art à une production plus générale, encore mal distinguée de l'artisanat. Mais ils témoignent de l'existence d'un travail intellectuel Les peintres de la Renaissance ne nient cependant pas qu'ils effectuent un travail: ils le veulent plus libre moins répétitif, et surtout orienté vers l'intellect. La formule de Vinci: La peinture est chose mentale signifie, non que l'aspect matériel de la peinture importe peu, mais qu'il introduit à un idéal, ou qu'il n'emprunte au visible que pour mener vers un monde qui ne lui appartient plus. [...]
[...] D'ailleurs, leurs œuvres, quelle que soit la peine qu'ils ont pu avoir à les mettre au point, sont-elles des produits comme les autres? III- L'Œuvre n'est pas un simple produit L'Œuvre comme manifestation sensible d'une idée En définissant l'œuvre d'art comme la manifestation sensible d'une idée Hegel équilibre aspect matériel et aspect intellectuel du travail artistique. Inscrire une idée dans le sensible suppose une modification de ce dernier (des matériaux), mais aussi qu'il ne soit là que pour diriger la pensée vers autre chose. [...]
[...] L'œuvre d'art est-elle le produit d'un travail ? L'Œuvre d'art bénéficie en général d'un tel halo de respectabilité que l'on peut hésiter à la considérer comme résultant aussi d'un travail. Pourtant, ce que l'on y admire ne peut être produit sans effort, et nombreux sont d'ailleurs les artistes qui, pour lutter contre ce que les théories de l'inspiration semblent suggérer de facilité ou de don du ciel soulignent les difficultés de leur activité. Il n'en reste pas moins que l'unicité (même relative) de l'œuvre s'oppose à la production en série, et que, si cette dernière est destinée à la consommation, l'œuvre semble bénéficier d'une indifférence au temps. [...]
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