La légende de l'âne de Buridan raconte l'histoire d'un âne que l'on a placé à égale distance d'un seau d'eau et d'un seau d'avoine. Ce dernier dépourvu de raison, se retrouve confronté à deux choix, de ce fait il est dans l'incapacité de prendre une décision finale et meurt de faim. Ce fameux dilemme de l'âne de Buridan illustre avec justesse le caractère du libre arbitre. Le libre arbitre est synonyme de liberté. Si définir le terme de liberté constitue généralement une difficulté importante, la notion de libre arbitre est un peu plus aisée à cerner. Car c'est la capacité que l'on a de se déterminer par soi même, spontanément et volontairement, c'est pouvoir assumer ses choix sans aucune contrainte.
Le Christianisme est une religion monothéiste qui met en avant les principes du Christ. Se basant sur l'ancien testament, le Christianisme, comme le révèle les études théologiques, place Dieu comme la perfection inébranlable. Ce dernier aurait créé l'Homme à son image, lui offrant la capacité de se déterminer par lui-même. La croyance chrétienne implique donc une adhésion à toute idéologie divine. Les chrétiens pratiquants s'en remettent à Dieu. Ainsi s'agit-il pour les théologiens, afin de légitimer leur confiance divine, de faire disparaître tout ce qui pourrait instaurer un doute quelconque.
Il semble a priori ne pas y avoir de lien évident entre libre arbitre et la christianité. L'un prône la prise de décisions sans contraintes, l'autre implique des points de vue, des règles prédéterminées (ex les dix commandements).
Cependant, dans son texte, Nietzsche présente les choses autrement. Il considère que le libre arbitre est une notion inventée par les théologiens pour servir la cause chrétienne.
L'on en vient à se demander si la notion de libre arbitre ne serait pas qu'un simple leurre ?
A ce problème Nietzsche, dans son argumentation fait ressortir progressivement trois mouvements majeurs.
[...] Or, ici, ce n'est pas une définition de libre arbitre qu'il dresse. Au contraire, il critique avec virulence la vision générale et abstraite et l'idée erronée que nous avons du libre arbitre à cause de l'influence théologique. Ce texte se présente comme étant une révocation radicale de l'idée du libre arbitre qu'il accuse d'être le fruit d'une invention construite de toutes pièces, une ruse maléfique qui serait le fruit des manipulations qu'exercent les théologiens sur nous. Le message que Nietzsche cherche ici à faire passer est clair : les théologiens se servent de nous, ils nous trompent, ils nous leurrent. [...]
[...] C'est plus précisément une notion à la frontière du somatique et du psychique, c'est-à- dire que c'est quelque chose que l'on ne contrôle pas, qui s'impose à nous naturellement. Dans cette idée de juger et punir, on ne retrouve pas l'idée de justice. Il semblerait que d'après Nietzsche il s'agirait pour les théologiens de juger dans le seul but de punir. Jamais le mot grâce n'apparaît. Chaque jugement semble être une condamnation. Les théologiens cherchent simplement des coupables qu'ils puissent juger pour mieux sanctionner. L'innocence n'est même plus considérée comme une option. [...]
[...] Quoique l'on fasse la sentence reste la même. Tout est fait pour nous punir, il s'agit toujours de culpabiliser l'homme pour préserver l'image divine. A plusieurs occasions, l'être suprême a infligé des sanctions à l'homme. On peut penser notamment à l'épisode de la tour de Babel, en empêchant l'homme de comprendre autrui en diversifiant le langage. A celui de l'arc de Noé, en noyant la population terrestre pour offrir une deuxième chance à la vie, ou encore celui du jardin d'éden, en condamnant l'homme au travail. [...]
[...] C'est ainsi que le libre arbitre génère le sentiment de responsabilité. Ce terme vient du latin respondere qui veut dire répondre L'expression répondre de ses actes signifie qu'on les assume dans leur intégralité. C'est être raisonnable, mature. Sommes-nous responsables de nos actes ? Si c'était le cas, un criminel qui tue en état de folie serait jugé par notre société responsable de son acte, or ce n'est pas le cas. Le fou n'est pas responsable de ses actes car il n'est pas libre mentalement. [...]
[...] Il montre ensuite que le libre arbitre n'est qu'un prétexte pour culpabiliser l'Homme et enfin, il implique que ce prétexte n'est autre qu'un instrument de domination en faveur des théologiens. Le crépuscule des Idoles, titre donné au recueil de Nietzsche du passage dont il est question ici, est d'ores et déjà très révélateur sur son contenu. En effet, le terme crépuscule vient du mot latin crepusculum et signifie aube. Qui dit crépuscule dit donc premières lueurs du jour, lueurs qui précèdent le lever du soleil, fin de la nuit, fin de l'obscurité. On retrouve ici le champ lexical de la croissante clarté, de la luminosité. [...]
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