L'imagination et la réflexion littéraire sont un problème occidental : si on va voir ailleurs, on trouve sur d'autres civilisations et sur une autre grande civilisation : la civilisation chinoise. Si l'on regarde ce que nous disent les textes de Confucius, grand philosophe chinois, on verra que l'œuvre littéraire ne doit pas du tout, pour Confucius, faire place à l'imagination. Celle-ci est complètement marginalisée dans la tradition chinoise. Pour Confucius, la production littéraire ne doit pas nous faire rêver, mais nous faire réfléchir. Il écarte donc tout ce qui échappe à la rectitude de la pensée, sans marginaliser ce qui pose la question du statut de l'extraordinaire, de l'étrange, du fictif. L'imaginaire ou l'imagination sont un pourvoyeur insatiable de ces éléments. La Chine s'est donc construite en marginalisant l'imagination, qui a un statut tout à fait secondaire et suspect.
[...] On évoque par exemple la façon de composer la fable, le fait que la composition poétique doive être belle. On est donc véritablement dans la question de la loi de composition de l'œuvre et non dans la question de l'imagination. La composition est privilégiée par rapport à l'invention. Ce qui va distinguer l'homme de l'animal n'est pas sa capacité à imaginer, mais sa capacité à imiter. Deux lois importantes : la composition réglée de l'ouvrage, et l'imitation comme propre de l'homme (mimésis). [...]
[...] Richelieu interdit donc les duels. La pièce de Corneille apparaissait donc comme en contradiction avec cette période où l'on tente de supprimer les duels (duel entre Dom Diègue et Dom Gormas Contraire du théâtre romantique où le héro va mourir sur scène avec de longues tirades. Ainsi, le théâtre est un outil de promotion de nouvelles mœurs, avec notamment l'exemple de la bienséance. Ces règles concernent le grand genre c'est-à-dire la tragédie. Pour le reste, ces règles peuvent être assouplies (pour la comédie, par exemple). [...]
[...] Mais comme cette perfection idéale ne peut être que visée, souvent l'artiste risque de ne pas l'atteindre et tombe souvent dans le spleen (Baudelaire). Poème Correspondance : c'est à travers les correspondances mystérieuses à expliciter par les hommes que le poète accomplit sa mission, ce qui le met dans une position entre l'idéal et le réel, entre le divin et l'humain. [...]
[...] Quelle valeur cette tradition occidentale accorde à l'imagination ? Entre la réalisation des œuvres et le discours théorique tenu sur l'imagination et l'imaginaire, il y a au moins un paradoxe et au pire un fossé qu'il nous faut expliquer. Si dans la réalisation des œuvres l'imagination a toute sa place et produit même des figures de personnages qui ont, jusqu'à nos jours, une réelle existence, en même temps, l'imagination n'est pas reconnue théoriquement comme une valeur. Il y a un premier état de l'imagination qui considère que la notion d'imagination dans la littérature n'existe ou n'est possible que si on la pense comme un rapport mystérieux entre l'œuvre et son créateur. [...]
[...] Une nouvelle valorisation de l'imagination Pseudo Longin, Traité du Sublime. Pseudo : on n'est pas sur que ce soit de lui. Ce traité propose une définition de la fantasia, qu'on traduira plus tard par imagination : une représentation mentale imagée et figurée qui doit se rattacher à toute conception susceptible d'engendrer du discours et permettre une représentation quasi hallucinatoire d'un certain nombre de choses dont nous parlons. Chez Quintilien comme chez Longin (contrairement à Platon) commence à émerger une possibilité que l'imagination soit positive et efficace parce qu'elle ne parle pas, certes, à la connaissance, mais à l'émotion. [...]
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