Que dit-on lorsque l'on affirme que telle ou telle action constitue une obligation morale ? Supposée guider l'action et lui conférer une vertu supérieure, la morale constitue un code de conduite relatif au bien et au mal qui fait consens au sein de la société. D'un point de vue humain, l'acte moral induit généralement la prise en compte de l'existence d'autrui dans le projet de mon action de sorte que celle-ci ne s'effectue pas à son détriment. Or ce code moral demeure en tant que tel informel : il fluctue selon les époques et les individus, comme en atteste l'évolution des pratiques, et plus encore que des pratiques, des lois – civiles ou religieuses - chargées de garantir la bonne application des principes de la morale.
[...] Des sanctions pour éduquer à la morale ? De ce point de vue, les sanctions prévues permettent aux individus de constater la réalité de la règle édictée en ressentant des conséquences concrètes de sa transgression : amende, privation de liberté, mise à l'épreuve. Par conséquent, au moins autant que la règle elle-même, la sanction remplit une fonction d'éducation en tant qu'elle répare le tort causé à la collectivité par une action non conforme aux principes moraux de l'ensemble social auquel appartient l'individu. [...]
[...] Or ce code moral demeure en tant que tel informel : il fluctue selon les époques et les individus, comme en atteste l'évolution des pratiques, et plus encore que des pratiques, des lois - civiles ou religieuses - chargées de garantir la bonne application des principes de la morale. De ce point de vue, la morale n'est pas pure intention, et la question de sa bonne application pose celle du recours éventuel à la contrainte : une morale sans sanction ni obligation est-elle possible ? Concernant un acte engageant le libre-arbitre et la reconnaissance d'autrui, l'existence d'une sanction réinterroge en effet la dimension morale de ce comportement censé manifester une forme d'humanité. [...]
[...] Cette analyse de l'opportunité de tel ou tel comportement en fonction du risque de sanction qui lui correspond justifie au contraire certaines transgressions : une société souhaitant réduire ses impôts et constatant que la législation lui est relativement favorable s'affranchit dès lors du dilemme moral de priver un Etat de ressources financières, ressources qu'il sera conduit à collecter auprès de classes sociales moins favorisées. Par conséquent, l'existence d'une sanction constitue un risque théorique pour la morale De ce fait, la mise en place d'une sanction empêche d'affirmer qu'un comportement procède d'une véritable intégration de l'impératif moral nous intimant de ménager autrui au détriment de notre intérêt propre. En cela, la sanction constitue un risque direct pour prouver l'existence d'un principe moral à l'origine d'une action. [...]
[...] En d'autres termes, c'est la contrainte de soi dans une direction culturelle et non pas naturelle qui atteste de l'intériorisation de la morale. L'obligation constitue une manifestation de notre humanité En ce sens, l'obligation intervient comme une manifestation de notre humanité et non pas nécessairement d'une contrainte extérieure qui nous ferait ployer par la force. La conséquence de cela est qu'un code moral qui ne crée pas d'obligations chez les individus ne serait par définition par de nature morale, il serait un comportement susceptible de varier, auquel l'on s'adonne par plaisir et non par humanité. [...]
[...] Conclusion Si le caractère contraignant semble constituer une dimension essentielle de la morale comme outil d'orientation du comportement des êtres humains, ce n'est donc pas tant parce que la contrainte crée une obéissance forcée, mais au contraire parce que l'ordre moral a vocation à être intériorisé par l'individu au point qu'il devienne son propre censeur. De ce point de vue, la contrainte est constitutive ne menace en rien la morale, elle la fonde, à condition qu'elle soit intérieure et volontaire. [...]
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