Paul Feyerabend, philosophe des sciences du XXème siècle, a longuement lutté pour une science libre, sans méthodologie ou directive de recherche, laissant ainsi au chercheur toute la liberté que lui permet d'avoir son esprit. Cette vision d'une théorie sans contrainte fut notamment développée dans son essai Contre la méthode, esquisse d'une théorie anarchiste de la connaissance. A l'origine, cette œuvre devait être écrite de pair par Feyerabend et Imre Lakatos , ce dernier défendant la thèse d'une science rationaliste, et Feyerabend allant à l'encontre de celle-ci. Cependant, Lakatos ne put achever la rédaction de sa position, c'est pourquoi nous ne retrouvons dans cet ouvrage que la défense du point de vue anarchiste, ainsi qu'une vive critique du rationalisme scientifique, anticipant les attaques de son confrère.
Le détachement de toute règle dans le cadre de l'élaboration de théories se décline sous plusieurs aspects que Feyerabend décrit largement. Tout d'abord, il tend à montrer que l'expérience ne mérite pas le rôle primordial que lui accordent parfois certains scientifiques. Ensuite, il prône une ouverture d'esprit totale, contre les sensations ou les observations faites, ce dans le but d'élaborer des théories vraiment novatrices, sans influence du passé, ou d'un formatage culturel. Pour présenter et soutenir son point de vue, Feyerabend utilise très largement des faits historiques, notamment le passage de la théorie aristotélicienne au copernicianisme. En outre, il compare l'histoire des théories à celles des langues naturelles pour expliquer leur fonctionnement, ainsi que l'incommensurabilité des théories entre elles. Pour conclure, il aborde la question de la place de la science accordée par l'Etat et souligne l'importance d'un détachement entre ces deux entités pour permettre un développement plus neutre de la science, et admet qu'elle est, au même titre que la religion par exemple, une certaine façon d'expliquer le monde qui nous entoure.
Dans un premier temps, nous verrons pourquoi Feyerabend prône un certain détachement vis-à-vis des faits et des expériences d'une part, mais aussi vis-à-vis sens. Il soutient l'irrationalité la plus complète pour élaborer de nouvelles théories. Nous nous intéressons ensuite à la façon dont il illustre les théories par le biais des langues et de l'art par exemple. Dans un dernier temps, nous verrons comment il juge l'influence des contextes sociaux et historiques sur le développement des sciences, et la place qu'il y attribue aujourd'hui dans notre société.
[...] En effet, l'observation de phénomènes physiques ou naturels passe par l'interprétation des perceptions de nos sens. De plus, une observation lointaine peut être trompeuse pour l'homme, car modifiée par le milieu naturel. Il faut veiller à ne pas négliger les modifications que nos sens, ou le milieu extérieur peuvent engendrer sur nos observations. L'utilisation de certains outils peut également engendrer une modification de la réalité. Ainsi, avec l'apparition des premiers télescopes de Galilée, ce sont souvent des images trompeuses des astres qui ont été observées, sans savoir avec quelle erreur elles étaient vues (en effet, à l'époque, les lois de l'optique étaient peu connues de Galilée). [...]
[...] Conclusion A l'issue de cette étude, nous avons donc pu nous intéresser à la critique de la méthode que mène Feyerabend dans son ouvrage Contre la méthode, Esquisse d'une théorie anarchiste de la connaissance. Après avoir passé en revue les limites des différentes règles imposées par différents scientifiques ou philosophes de sciences, il donne quelques contre-ordres de travail, entre autres : ne se fier ni à l'expérience, ni aux sens, imaginer des théories totalement novatrices sans chercher à englober les systèmes existants, poser des hypothèses ad hoc Pour justifier son point de vue, il décrit très largement la façon donc Galilée et Copernic ont introduit l'hypothèse copernicienne. [...]
[...] On peut s'interroger dans quelle mesure le suivi des contre-méthodes de Feyerabend couperait ces chercheurs anarchistes du reste de la communauté. Il n'est pas clair que le soutien soit aussi fort si l'on mène une recherche totalement améthodique. Ainsi, encore une fois, il faut savoir être convaincant et persuasif. Feyerabend avoue d'ailleurs qu'une théorie fondée sur une démarche méthodique a parfois plus de chance d'être acceptée, et c'est pourquoi il concède que de travailler avec Lakatos (qui tient un discours tout de même plus méthodique que lui), ce qui lui donne plus de poids et de valeur. [...]
[...] Comment choisir alors une théorie ? Une comparaison générale entre deux théories absolument différentes étant impossible d'une manière globale, il faut considérer d'autres critères, moins généraux, pour déterminer les théories à garder. C'est là qu'intervient alors une part de subjectivité dans les Sciences. En effet, devrons-nous alors préférer les théories les plus logiques, les plus proches de modèle mathématique, les plus rationnelles ? Si les deux théories proposent des résultats corrects, le choix sera donc une question à laquelle chacun pourra donner une réponse différente, selon son point de vue ou ses sens S'imposerait alors une théorie des sens. [...]
[...] Tout d'abord, il ne faut pas forcément chercher à inclure les théories déjà connues dans celles en cours d'élaboration. S'imposer cette condition limite très largement les champs de recherche, pour ne finalement chercher qu'à développer une théorie déjà mise en place, et non à faire une théorie totalement nouvelle. Il est bon, au contraire, d'imaginer des systèmes totalement différents à ceux déjà connus, qui correspondraient peut-être mieux à la réalité. Feyerabend cite ici Bacon, selon qui il ne faut pas cloisonner la recherche scientifique par des méthodes, en dépit de quoi son volume stagne. [...]
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